Trixy, la fidèle chatte d’Henry Wriothesley

Un portrait de Henry Wriothesley avec son chat Trixy

Figure importante de la cour d’Elizabeth 1er (1533-1603), Henry Wriothesley (1573-1624) était un personnage haut en couleur qui sut dans sa jeunesse s’attirer les sympathies de la reine. 

 

Du fait de sa popularité, il inspira plusieurs œuvres en vers, dont le poème « Narcissus » écrit en 1591 par l’auteur anglais John Clapham (1566-1619). Celui-ci revisite la légende de Narcisse, un beau jeune homme tombant amoureux de lui-même. Cela en dit long sur la réputation du troisième comte de Southampton, qui à cette époque passait le plus clair de son temps à la cour.

 

Grand amateur d’art et de littérature, il fut aussi l’un des mécènes du dramaturge anglais William Shakespeare (1564-1616). Ce dernier lui dédia d’ailleurs deux poèmes : Venus et Adonis (Venus and Adonis, en version originale), écrit en 1593 ; et Le Viol de Lucrèce (The Rape of Lucrece), datant de 1594. 

 

Il se retrouva cependant du mauvais côté de l’histoire lorsqu’en 1601 il participa à la rébellion d’Essex, menée par le général Robert Devereux, deuxième Earl d’Essex (1565-1601). Ce complot visait à exercer une pression politique sur la reine tombée en disgrâce après une série d’échecs militaires et politiques, notamment en Irlande. Cette insurrection fut néanmoins déjouée, et Wriothesley jugé puis condamné à mort pour trahison. Sa sentence fut toutefois commuée par la reine en peine d’emprisonnement à vie.

 

Il fut incarcéré à la Tour de Londres, mais dans un appartement confortable. Un portrait de lui réalisé après 1600, peut-être par le Flamand John de Critz (qui naquit en 1551 ou 1552, et mourut en 1642), suggère par ailleurs qu’il ne passa pas l’intégralité de son séjour en prison tout seul. On peut en effet y voir derrière lui un chat à la robe tuxedo (c’est-à-dire noir sur le dos et le haut des pattes, blanc sur le cou, le ventre et le bout des pattes).

 

L’amateur d’antiquités et naturaliste britannique Thomas Pennant (1726-1798) raconta en 1793 dans son livre Some Account of London (non traduit en français) qu’il s’agissait du chat du comte de Trixy. Celui-ci aurait si mal supporté si mal la séparation avec son maître qu’il se serait rendu par lui-même jusqu’à la célèbre prison londonienne et aurait réussi à accéder à son appartement en descendant par la cheminée. 

 

Quoique très romanesque et très appréciée des amoureux de la gent féline, cette histoire est cependant jugée peu crédible par les historiens. Selon eux, Trixy fut en réalité amené à la prison par Elizabeth Vernon (1572-1655), l’épouse du comte. Au demeurant, cette peinture ne permet de savoir si le chat bénéficia seulement d’un simple droit de visite ou s’il resta confiné avec son propriétaire jusqu’à sa libération. Wriothesley fut en effet relâché en 1603, soit deux ans après son emprisonnement, lorsqu’Elizabeth 1er mourut et que Jacques 1er (1566-1625) fut couronné roi d’Angleterre. 

 

Ce tableau est en outre la seule preuve de l’existence du chat de Wriothesley. Or, certains émettent des doutes sur la véracité de la scène qu’il représente : la présence d’un petit félin pourrait tenir simplement d’une liberté prise par l’artiste. En effet, il était courant à cette époque d’ajouter dans les tableaux réalistes des éléments et des personnages qui en réalité n’étaient pas présents dans la scène représentée, afin de rendre le sujet plus sympathique.

Dernière modification : 06/01/2025.