Dans l'ensemble, les chats ont une santé plutôt robuste : ils vivent d'ailleurs assez longtemps pour des animaux de leur gabarit. En effet, leur espérance de vie est de l'ordre de 15 ans, et ne cesse de s'allonger au fur et à mesure des progrès réalisés en médecine vétérinaire.
Néanmoins, toutes sortes de maladies deviennent plus fréquentes avec l'âge, du fait du vieillissement naturel de l'organisme. C'est le cas par exemple de l'hyperthyroïdie, qui touche en particulier les individus âgés.
À quoi est-elle due ? Quels en sont les principaux symptômes, et quelle est l'espérance de vie d'un chat qui en est atteint ? Est-il possible de la traiter, et le cas échéant à quel prix ?
L'hyperthyroïdie est une maladie chronique caractérisée par une production excessive d'hormones thyroïdiennes, c'est-à-dire produites par la thyroïde. Il s'agit donc d'une maladie hormonale (ou endocrinienne).
La thyroïde d'un chat est une petite glande en forme de papillon située à la base du cou, devant la trachée. Elle utilise l'iode apporté par l'alimentation pour produire diverses hormones chargées de réguler la vitesse de fonctionnement de l'organisme : plus elle est active, plus les cellules du corps le sont aussi - et inversement.
Il arrive toutefois qu'elle se dérègle : l'on parle d'hypothyroïdie lorsqu'elle ne produit pas suffisamment d'hormones, et d'hyperthyroïdie lorsqu'au contraire elle en produit une trop grande quantité.
Cette dernière concerne essentiellement les chats âgés, puisqu'elle apparaîtrait en moyenne vers l'âge de 15 ans. Elle est en outre assez courante : selon une étude intitulée « Feline hyperthyroidism reported in primary-care veterinary practices in England: prevalence, associated factors and spatial distribution » et publiée en 2014 dans la revue scientifique The Veterinary Record, elle toucherait environ 9% des chats de plus de 10 ans. Il ressort également de cette étude que certaines races comme le Siamois, le Burmese Anglais et le Persan semblent moins enclines à la développer.
Chez le chat, la survenue d'une hyperthyroïdie est consécutive à la présence d'une ou plusieurs tumeur(s) au niveau de la thyroïde.
Ces dernières sont presque toujours (environ 95% des cas) des tumeurs bénignes, c'est-à-dire des grosseurs qui n'altèrent pas les tissus sur lesquels elles prospèrent et qui ne créent pas de métastases. Dans les autres cas, l'hyperthyroïdie est le fait de tumeurs malignes, c'est-à-dire de cancers. Il arrive toutefois qu'une forme bénigne évolue au bout de plusieurs années vers une forme maligne, mais cela reste rare.
Dans tous les cas, la présence d'une ou plusieurs tumeurs entraîne un grossissement de la thyroïde, ce qui se traduit par une augmentation de la quantité d'hormones produites par cette dernière - et donc une hyperthyroïdie.
Les raisons pour lesquelles une tumeur se forme sur la thyroïde sont encore mal comprises : il est d'ailleurs probable que le phénomène soit multifactoriel. Par exemple, une étude intitulée « Iodine concentration in commercial cat foods from three regions of the USA, 2008–2009 » et publiée en 2013 dans le Journal of Feline Medicine and Surgery indique que la fluctuation importante des apports en iode dans les aliments industriels (et en particulier dans les pâtées pour chat) pourrait être un facteur d'apparition de tumeurs à l'origine d'une hyperthyroïdie.
Dans la mesure où les hormones thyroïdiennes régulent la vitesse de fonctionnement de la plupart des tissus et organes, une hyperthyroïdie se traduit par des symptômes assez variés et globaux.
Les plus évocateurs sont un amaigrissement allant de pair avec un appétit augmenté : le chat perd rapidement du poids alors qu'il mange toujours autant, voire plus qu'avant. Il peut même se mettre à réclamer davantage de nourriture. Ils s'accompagnent habituellement d'une augmentation de la soif et de la production d'urine, de troubles digestifs intermittents (en particulier diarrhée et/ou vomissements) ainsi que d'une hyperactivité.
D'autres symptômes sont également possibles, même s'ils sont plus rares : des miaulements intempestifs, une anomalie du rythme cardiaque, une hyperthermie, des difficultés à respirer, des lésions cutanées, un état d'abattement...
L'hyperthyroïdie est une maladie chronique : elle ne guérit pas spontanément, et a même tendance à s'aggraver au fil des mois voire des années. En outre, elle finit par dégrader les autres organes - voire par causer le décès de l'animal.
Dans la mesure où les hormones thyroïdiennes régulent la vitesse de fonctionnement de la plupart des organes et tissus, une hyperthyroïdie peut avoir des répercussions plus ou moins graves sur l'ensemble de l'organisme.
Ainsi, en l'absence de traitement, il est courant d'observer à plus ou moins brève échéance des anomalies au niveau notamment :
Par ailleurs, certaines de ces complications sont elles-mêmes susceptibles d'avoir à terme des répercussions sur d'autres organes si elles ne sont pas traitées. Par exemple, une hypertension non soignée est très souvent responsable d'atteintes oculaires plus ou moins sérieuses, pouvant aller jusqu'à la cécité.
Le nombre et la nature des complications déterminent le pronostic de l'animal : en particulier, des atteintes cardiaques et/ou rénales entraînent souvent un pronostic mauvais. Diagnostiquer l'hyperthyroïdie suffisamment tôt est un donc un enjeu essentiel pour pouvoir la traiter avant que des organes vitaux ne soient fatalement atteints.
L'hyperthyroïdie n'est pas bien difficile à suspecter, même par le maître lui-même : elle survient habituellement alors que le chat a plus de 10 ans, et on observe une perte de poids notable malgré un appétit constant voire augmenté.
Dans une telle configuration, le vétérinaire réalise alors une palpation du cou de l'animal afin de détecter un potentiel gonflement de la thyroïde.
Il effectue également une prise de sang : cela lui permet non seulement de mesurer le taux d'hormones thyroïdiennes dans l'organisme, mais aussi d'identifier d'éventuels dysfonctionnements au niveau hépatique, sanguin et/ou rénal.
Il peut également décider de faire une échographie s'il souhaite déterminer la cause sous-jacente de l'hyperthyroïdie et/ou évaluer l'état de certains organes vitaux (en particulier le coeur).
L'hyperthyroïdie est une maladie grave, car elle finit à terme par détériorer l'ensemble des organes. Toutefois, il est possible de mettre en place un traitement pour l'atténuer voire la faire disparaître.
Plusieurs options sont possibles, chacune présentant ses avantages et inconvénients : un traitement par iode radioactif, un traitement médicamenteux, la mise en place d'une alimentation spécifique ou encore une opération chirurgicale. Les dépenses correspondantes peuvent toutefois être élevées, et sont rarement prises en charge par l'éventuelle assurance santé du chat - a fortiori si ce dernier est très âgé lorsqu'il tombe malade.
Quelle que soit l'option retenue, il peut être nécessaire de mettre également en place un traitement complémentaire si des complications sont déjà présentes - en particulier au niveau du coeur ou des reins.
Le traitement par iode radioactif consiste à injecter de l'iode radioactif par perfusion : la thyroïde l'absorbe comme s'il s'agissait d'iode normal, ce qui cause rapidement la destruction des tumeurs grâce à la radioactivité. Il ne nécessite généralement qu'une seule séance, mais le chat doit tout de même être hospitalisé pendant une à deux semaines pour s'assurer que cette dernière n'a pas d'effet délétère sur son organisme.
Le principal avantage de ce traitement est qu'il est (presque toujours) définitif : la thyroïde se remet à produire une quantité normale d'hormones et les rechutes sont très rares, si l'on en croit une étude intitulée « Radioiodine treatment of 524 cats with hyperthyroidism » et publiée en1995 dans le Journal of American Veterinary Medical Association. Par ailleurs, le risque d'effets secondaires est faible et maîtrisé.
Son principal inconvénient est qu'il est compliqué à mettre en place, car il requiert des équipements dont peu de cliniques vétérinaires sont dotées. De plus, il est coûteux : il faut généralement compter entre 1000 et 2000 euros. Ces facteurs expliquent que, malgré son efficacité, le recours à d'autres options demeure assez courant.
Divers médicaments sont efficaces pour traiter une hyperthyroïdie et ainsi atténuer - voire faire disparaître - les symptômes.
Dans le cas des chats, le médicament privilégié est le méthimazole, aussi appelé thiamazole au Canada. Il bloque la synthèse des hormones thyroïdiennes en empêchant la thyroïde de correctement absorber l'iode apporté par l'alimentation. Il se présente sous la forme de comprimés ou de solutions buvables, qu'il faut administrer une à plusieurs fois par jour tout le reste de la vie de l'animal. Quelques semaines sont souvent nécessaires au départ pour trouver le dosage approprié.
Le méthimazole s'avère le plus souvent efficace pour réguler la quantité d'hormones thyroïdiennes produites. Toutefois, il ne règle pas le problème initial, à savoir la présence de tumeurs potentiellement malignes. Par ailleurs, les effets secondaires sont monnaie courante : les plus fréquents sont des troubles digestifs, des démangeaisons et/ou un abattement, si l'on en croit une étude intitulée « Best practice for the pharmacological management of hyperthyroid cats with antithyroid drugs » et publiée en 2014 dans le Journal of Small Animal Practice. Enfin, son coût peut s'avérer élevé sur le long terme, puisqu'il faut globalement compter entre 30 et 40 euros pour 100 comprimés.
Si le méthimazole s'avère inefficace ou si les effets secondaires sont trop importants, le vétérinaire se rabat généralement sur un autre médicament (en particulier le carbimazole) voire carrément une autre technique de traitement.
Pour fonctionner, la thyroïde a besoin de certains nutriments. En particulier, plus elle reçoit d'iode, plus la production d'hormones est élevée. Une solution pour réduire cette dernière - et donc limiter les symptômes de d'hyperthyroïdie - consiste à fournir au chat une alimentation qui en comporte moins.
On trouve sur le marché à la fois des croquettes et des pâtées pour chat appauvris en iode, à un prix comparable à celui des aliments « normaux ».
Le principal inconvénient de cette solution est que ce régime nutritionnel doit être respecté scrupuleusement, c'est-à-dire que le chat ne doit absolument rien manger d'autre. Par exemple, il ne saurait être question qu'il ingère des restes de table, de la nourriture destinée à un autre animal ou même des proies qu'il aurait attrapées en extérieur. C'est donc une option réaliste surtout dans le cas d'un petit félin qui est le seul animal du foyer et qui vit cantonné en intérieur.
Par ailleurs, même lorsque le régime est correctement suivi, il ne détruit pas les tumeurs, et ne permet pas toujours non plus de faire disparaître certains symptômes comme l'amaigrissement ou la tachycardie. C'est d'ailleurs ce que souligne une étude intitulée « Effect of Feeding an Iodine-Restricted Diet in Cats with Spontaneous Hyperthyroidism » et publiée en 2015 dans le Journal of Veterinary Internal Medicine. Un traitement complémentaire peut donc être nécessaire pour atténuer - voire faire disparaître - les symptômes résiduels : par exemple, un médicament vasodilatateur en cas de tachycardie.
Une dernière option pour traiter l'hyperthyroïdie d'un chat est la thyroïdectomie. Il s'agit d'une opération chirurgicale consistant à retirer les tumeurs afin de redonner à la thyroïde sa taille « normale ». Elle se pratique sous anesthésie générale, mais suppose que la maladie ait au préalable été stabilisée à l'aide d'un traitement médicamenteux - généralement à base de méthimazole ou de carbimazole.
Il faut toutefois savoir que la possibilité d'envisager une telle opération chirurgicale dépend surtout de l'état de santé du chat : s'il est très vieux, malade et/ou affaibli, les risques de l'anesthésie pour sa santé sont trop importants, et une autre option est alors à privilégier (par exemple l'alimentation spécifique ou les médicaments).
Cette intervention a aussi pour inconvénient que le taux de récidive peut s'avérer élevé selon la nature et la localisation des tumeurs. Ainsi, une étude intitulée « Changes in thyroid and renal function after bilateral thyroidectomy in cats » et publiée en 2019 dans le Journal of Veterinary Internal Medicine évoque un taux de récidive de 22% au bout de 6 mois et de 44% au bout de 3 ans à compter de l'opération si des tumeurs étaient présentes des deux côtés de la thyroïde.
Par ailleurs, il n'est pas rare qu'une trop grande quantité de tissus thyroïdiens soit retirée lors de l'intervention : il en résulte alors une hypothyroïdie (c'est-à-dire au contraire une production trop faible d'hormones par la thyroïde), nécessitant une complémentation hormonale à vie. D'autres séquelles post-opératoires sont possibles, notamment au niveau du visage ou des cordes vocales.
Enfin, faire opérer un chat de la thyroïde coûte cher : il faut généralement compter entre 1000 et 2000 euros.
Le pronostic d'un chat atteint d'hyperthyroïdie dépend surtout de la nature des complications au moment du diagnostic, et il en va de même de son espérance de vie.
En effet, même s'il existe diverses options efficaces pour traiter l'hyperthyroïdie elle-même, certaines de ses complications sont incurables et conduisent au décès à plus ou moins court terme. C'est le cas en particulier de l'insuffisance rénale, ainsi que de certaines pathologies cardiaques. Si de telles complications sont déjà présentes et bien avancées lorsque l'hyperthyroïdie est détectée, l'espérance de vie du chat dépasse rarement un ou deux ans à compter du diagnostic, même s'il bénéficie d'un traitement.
En revanche, le pronostic est bien meilleur en l'absence de complications rénales ou cardiaques. Dans ce cas, la mise en place d'un traitement adéquat permet de contrôler la production d'hormones thyroïdiennes, et d'éviter que ces dernières n'endommagent les organes vitaux. Par conséquent, si l'hyperthyroïdie est détectée à un stade précoce, l'espérance de vie du petit félin est peu impactée : elle est finalement comparable à celle d'un congénère en bonne santé.
L'hyperthyroïdie est une maladie hormonale courante au sein de la gent féline, en particulier au-delà d'un certain âge. Elle est causée par l'apparition d'une ou plusieurs tumeur(s) au niveau de la thyroïde, ce qui entraîne une augmentation de la quantité d'hormones produites par cette dernière et au final un dérèglement de l'ensemble de l'organisme. Elle ne guérit pas spontanément, mais divers traitements existent pour la soigner ou en tout cas réduire les symptômes qu'elle occasionne. Si elle est prise en charge à temps, l'animal peut espérer vivre encore plusieurs années en bonne santé.
L'hyperthyroïdie n'est pas la seule maladie fréquente chez les chats âgés : c'est le cas par exemple aussi de l'insuffisance rénale. En effet, nos petits félins ont des reins fragiles, qui s'abîment rapidement avec l'âge. Or, contrairement aux troubles de la thyroïde, les dysfonctionnements rénaux sont souvent graves et difficiles à traiter. Toutefois, là encore, une prise en charge précoce permet de faire vivre son chat plus longtemps.