Quelle meilleure occasion qu'une interview d'un éleveur de chats (Frédéric Richard, qui a fondé il y a plus de 20 ans l'élevage de la Natte-à-Chats) pour en savoir plus sur leur reproduction ?
Même si bien sûr un éleveur doit également gérer de nombreux autres aspects, celle-ci est au coeur de son activité. Il est donc intéressant de savoir comment se passe par exemple le choix des reproducteurs, l'organisation des accouplements, mais aussi les premières semaines de vie des petits ainsi que leur adoption au terme de celles-ci.
En France, la législation limite désormais le nombre de portées qu’une chatte peut avoir à trois sur deux ans. Peu importe le nombre de chatons dans chaque portée (statistiquement, une portée compte en moyenne un peu moins 4 chatons, mais il peut arriver par exemple qu’elle en comporte un seul), c’est le nombre de ces dernières qui compte. Il est donc judicieux de sélectionner des reproducteurs (en particulier des femelles) issues d’une lignée dont le nombre de chatons par portée est supérieur à la moyenne, en espérant bénéficier de cette caractéristique souvent héréditaire.
En revanche, il faut généralement éviter la consanguinité, même si elle est parfois sciemment recherchée afin de renforcer certains traits de caractère. Elle provoque en effet un appauvrissement du patrimoine génétique et la résurgence de l’expression de gènes récessifs. Ce faisant, elle peut être à l’origine de diverses faiblesses immunitaires, tares ou maladies. Pour ces raisons, il est conseillé de toujours bien étudier les lignées des reproducteurs envisagés, afin de maximiser le brassage génétique.
Or, la plupart des éleveurs de chaque pays travaillent en clans. De ce fait, même s’ils veillent à éviter toute consanguinité proche, la diversité génétique est assez faible. Pour éviter cet écueil, nous n’hésitons pas à aller chercher nos reproducteurs à l’étranger et à nous appuyer sur la base de données PawPeds.
Une pratique répandue est aussi de chercher ses futurs reproducteurs auprès d’éleveurs dont les animaux sont régulièrement primés dans les expositions félines. Cela indique en effet qu’ils sont ceux dont la morphologie colle le plus au standard de leur race. Or, ce que beaucoup de gens ignorent, c’est que la majorité des races de chats qui existent actuellement ont été créées par l’Homme tout à fait récemment (à partir de la fin du 19ème siècle), et donc que les standards de race sont purement artificiels. À trop vouloir en être proche pour gagner des prix, on obtient des spécimens souffrant d’hypertype, c’est-à-dire d’une accentuation à l'extrême de certains traits distinctifs : l’exemple le plus frappant, ce sont les Persans à la face tellement écrasée qu’ils souffrent de problèmes respiratoires et oculaires.
Pour notre part, le palmarès de l’élevage ne fait donc pas partie de nos premiers critères de choix. Nous n’y sommes certes pas insensibles, mais regardons avec davantage d’attention la propreté ainsi que le soin apporté aux animaux, et veillons à retrouver un mode d’élevage le plus familial et proche du nôtre possible afin d’obtenir des reproducteurs faciles à acclimater à notre environnement intérieur. Dans le cas contraire, l’animal en souffrirait, et cela pourrait être un handicap pour la reproduction.
Lorsqu’un particulier adopte un chaton destiné à la compagnie, ses principales attentes se cantonnent à ce que l’animal soit en bonne santé et sache apporter du bonheur au sein du foyer. Pour la majorité des adoptants, cela suppose qu’il apprécie voire recherche le contact avec les humains : plus rares sont ceux qui souhaitent au contraire un animal indépendant. Bien des adoptants savent également qu’il faut choisir un chaton dont l’éducation a été réalisée afin de le préparer à telle ou telle configuration en termes de conditions de vie : on n’élève pas de la même manière un animal destiné à la vie en appartement et un autre qui a vocation à évoluer en toute liberté dans un cadre rural. Au global, il est relativement facile pour un particulier d’identifier un d’élevage et un chaton qui correspondent à ses critères.
C’est plus compliqué pour un professionnel qui souhaite acquérir un individu destiné à la reproduction, car ses attentes vont bien au-delà : non seulement ses critères de santé sont plus draconiens (avec notamment la prise en compte d’aspects génétiques), mais il recherche aussi des capacités de reproduction au-dessus de la moyenne. Dans l’idéal, il faudrait pouvoir acheter une jeune chatte qui a déjà fait deux superbes portées, pour être quasiment certain d’avoir une belle reproductrice. Mais évidemment, de tel animaux ne sont jamais à vendre… Dans la pratique, il y a donc une grande part d’aléatoire : ce n’est que plus d’un an après l’adoption que la première portée arrive, et il faut attendre au moins deux portées supplémentaires pour apprécier la fertilité dans la durée.
En outre, un animal destiné à la reproduction est amené à vivre en groupe avec des congénères : il doit donc être sociable avec ces derniers. Or, contrairement aux chiens qui sont des animaux de meute (un trait de caractère hérité de leur ancêtre, le loup), les chats sont solitaires et peu sociables. De ce fait, beaucoup d’entre eux s’adaptent mal à la vie en communauté telle qu’elle se déroule au sein d’un élevage. Pour certains, les choses s’arrangent avec le temps, mais d’autres restent stressés toute leur existence ce qui les rend bien entendu incompatibles avec la reproduction. Or, comme pour la fertilité, ce n’est qu’un certain temps après l’adoption (plusieurs mois, en l’occurrence) que l’on peut voir ce qu’il en est ; bien des éleveurs peuvent confirmer que le résultat en la matière n’est pas toujours celui escompté.
Dans notre cas, nos acquisitions ont heureusement toujours donné satisfaction, hormis une expérience malheureuse avec une jolie femelle qui n’a absolument pas su s’adapter à la vie au contact d’humains – d’autant qu’à l’époque nous avions nos enfants à la maison. Elle n'a jamais donné de bons résultats pour la reproduction (gestations n’allant pas à terme, surmortalité, faible nombre de chatons par portée…), et nous avons fini par nous en séparer vers ses trois ans. Pour le coup, il faut admettre que des chatteries plus conventionnelles ont moins de chances d’avoir ce genre de problèmes, puisqu’elles permettent aux reproducteurs d'avoir à la fois moins de contact avec les humains et davantage de place.
Enfin, nous tenons à avoir des chats très proches des humains. Il s’agit d’un aspect valorisé par les particuliers souhaitant adopter un animal de compagnie, mais qui l’est habituellement moins par les professionnels cherchant un spécimen destiné à la reproduction. De fait, lorsque nous acquérons un futur reproducteur parmi les chatons d’un autre éleveur, son niveau de familiarisation avec les humains est rarement à la hauteur de nos attentes, car il est souvent largement en-deçà de celui des nôtres.
Dans chaque pays, les chats de race sont inscrits dans un registre officiel régi par un organisme habilité, qui procède souvent de manière analogue : la production de chaque éleveur est identifiée par une sorte de « nom de famille » appelé « affixe ». Les éleveurs peuvent choisir assez librement la terminologie de leur affixe ; la plupart ne se restreignent pas à un mot unique mais optent pour un groupe de mots, une expression qui identifie leur exploitation avec une certaine poésie ou originalité, voire grandiloquence.
Ensuite, chaque chaton se voit attribuer un nom - ou plutôt un prénom. La seule vraie contrainte à ce niveau (du moins en France) est que celui-ci doit commencer par une certaine lettre propre à son année de naissance. Par exemple, tous les chats nés en 2023 doivent avoir un prénom commençant par U. La plupart des éleveurs cherchent l’originalité, si bien que les prénoms de leurs chats sont souvent assez exotiques.
L’appellation complète et officielle de l’animal est donc la juxtaposition de son prénom et de son affixe : elle peut donc être assez longue et/ou excentrique. Faudrait-il pour autant moins de légèreté à ce niveau ? À mon sens, la vie moderne est bien trop rigide pour se priver de ce genre de petites libertés qui en effet peuvent parfois faire sourire.
En tout état de cause, les intéressés eux n’en ont que faire : d’une part, ils ne savent pas lire ce qui est écrit sur leurs papiers d’identification, et d’autre part ils sont très peu réceptifs à leur nom, en particulier si celui-ci est long ou complexe. Nous sommes toutefois vigilants sur ce dernier point et veillons à toujours choisir un prénom court pour nos chatons : d’ailleurs, il semble que près de la moitié de nos adoptants conservent celui-ci plutôt que de rebaptiser leur animal.
Un élevage classique comporte une chatterie, c’est-à-dire un lieu distinct hébergeant plusieurs mâles et un nombre plus ou moins élevé de femelles. Lorsque l’éleveur souhaite faire se reproduire deux individus, il les isole temporairement ensemble : la chatte en chaleurs est alors placée dans l’enclos de l’étalon sélectionné.
Il effectue son choix en fonction de critères génétiques (afin de favoriser l’obtention de chatons arborant telle ou telle particularité physique, par exemple une couleur et/ou un motif de robe spécifique) ou des qualités respectives de ses animaux - notamment lorsqu’il envisage de conserver pour son propre usage un des chatons (la plupart du temps une femelle) afin d’en faire un reproducteur à son tour.
Notre cadre d’élevage n’a toutefois pas grand-chose en commun avec ce qui se pratique habituellement. En effet, nos animaux vivent avec nous en appartement, et non pas en chatterie. De ce fait, il est tout simplement impossible de détenir plus d’un étalon : cela provoquerait une course aux marquages urinaires, et des batailles entre mâles lorsque les chattes sont en chaleurs. La seule chose que nous pouvons faire si nous souhaitons donner naissance à des chatons présentant certaines caractéristiques (notamment en termes de robe), c’est de choisir lors de leur acquisition nos femelles et notre étalon selon des phénotypes (c’est-à-dire des attributs visibles) précis, mais aussi tenir compte des informations sur leurs pedigrees, afin d’en déduire au mieux leurs génotypes (leur patrimoine génétique).
Le second corollaire de notre mode d’élevage est l’impossibilité de séparer sur de longues périodes notre mâle des femelles. Or, ces dernières étant régulièrement en chaleurs (environ 8 à 12 jours tous les 20 à 25 jours), elles seraient susceptibles d’avoir trois portées par an si on laissait faire les choses. Ce ne serait clairement pas souhaitable, car chaque période de gestation puis d’allaitement est éprouvante pour elles : tant pour leur bien que pour éviter d’obtenir des chatons fragiles voire de perdre des portées, mieux vaut les espacer. Ainsi, les éleveurs sont contraints de réguler les portées : la loi l’impose, mais c’est aussi dans leur propre intérêt. Or, la pratique habituelle qui consiste à isoler en cage les étalons (que ce soit de façon permanente, ou seulement pendant les périodes de chaleur des femelles) n’est pas applicable en appartement, c’est-à-dire dans notre cas.
Notre mâle ne subit donc pas ce désagrément, mais se voit en contrepartie administré de temps à autre par le vétérinaire un traitement le rendant infertile durant quelques semaines ou mois. Quant aux femelles, l’usage de contraceptifs hormonaux est à proscrire, mais l’administration de mélatonine peut être utile pour essayer de limiter les chaleurs. Elle peut s’effectuer via un implant sous-cutané, ou bien oralement. Dans le second cas, le protocole est assez contraignant, car il faut le faire trois heures avant le coucher du soleil. C’est néanmoins la méthode à laquelle nous avons recours, car elle s’avère relativement efficace et permet davantage d'espacer les chaleurs que de les stopper complètement.
Il n’existe pas d’équivalent de la ménopause chez la gent féline. Par conséquent, une chatte peut théoriquement se reproduire jusqu’à un âge avancé. Il faut toutefois prendre en compte que sa fertilité baisse avec l’âge - une problématique qu’on retrouve également chez le mâle. Surtout, son organisme est d’autant moins apte à engendrer une descendance à la fois nombreuse et en bonne santé qu’il est âgé. C’est particulièrement vrai si elle a accumulé les gestations au cours de son existence, car chacune d’elles le met à l’épreuve et le fatigue. De fait, à partir d'un certain seuil, la fréquence des complications (qu’elles portent sur la gestion, la mise bas ou l’allaitement) augmente.
Compte tenu de tout cela, et dans une optique de respect de nos animaux, nous ne faisons se reproduire nos femelles que pendant 5 à 7 années, et donc les stérilisons vers l’âge de 7 ans. Nous faisons de même avec nos mâles au bout de 8 à 10 années. Bien entendu, ces durées sont parfois fortement raccourcies lorsque l’on s’aperçoit qu’un individu n’est finalement pas bien adapté pour la reproduction, ce qui malheureusement arrive de temps en temps.
En tout état de cause, nous pensons que le respect de la vie animale doit faire partie des priorités : ce n’est pas parce qu’un chat reste un très bon reproducteur jusqu’à un âge avancé qu’on peut se permettre de continuer à le faire « travailler » trop longtemps. Comme les humains, les animaux devraient pouvoir profiter d’une longue « retraite » en bonne santé.
D'ailleurs, au même titre qu’il existe dans de nombreux pays (dont la France) une législation relative à la fréquence des gestations et à l’âge minimal de mise à la reproduction d’une chatte, nous pensons qu’il faudrait introduire une limite haute légale : à partir d’un certain âge, une mise à la retraite obligatoire devrait être imposée, quel que soit le sexe d’ailleurs. Et pour protéger également les autres espèces d’élevage non alimentaire (notamment les chiens et les chevaux) contre une exploitation abusive, il serait judicieux d’en faire de même avec elles.
Le chat fait partie des espèces nidicoles, comme le chien. Toutefois, contrairement à lui, ce n’est pas un animal social : les représentants de cette espèce vivent de manière solitaire et n’éprouvent pas le besoin d’être en groupe. Contrairement aux chiens, les chats n’ont donc aucun besoin de l’Homme pour vivre ; les chatons deviennent d’ailleurs rapidement autonomes. Cela ne veut pas dire pour autant qu’ils peuvent être cédés à n’importe quel âge…
Lorsque l’on parle d’âge d’adoption, le mot « sevrage » vient souvent à l’esprit. Or, bien des confusions se cachent derrière ce terme… Au sens strict, il désigne le moment où le chaton n’est plus dépendant de sa mère pour son alimentation, c’est-à-dire le sevrage alimentaire.
Ce dernier est susceptible de se produire dès l’âge d’un mois : à ce moment-là, le petit peut se nourrir de pâté ou croquettes s’il se trouve séparé de sa mère. Dans les faits, il ne l’est généralement pas, et c’est tant mieux ; ainsi, le sevrage alimentaire survient plutôt vers l’âge de 8 semaines. Pour autant, cela n’empêche pas que tant qu’il n’est pas séparé de sa mère, il continue à la téter tant qu’elle a du lait (parfois jusqu’à plus de 5 mois). D'ailleurs, le seuil des 8 semaines est en France et dans de nombreux autres pays l’âge minimum légal à partir duquel un éleveur a le droit de vendre un chaton, et ce faisant de le séparer un chaton de sa mère : avant cela, toute cession est interdite, même dans le cadre d’un don.
Beaucoup d’éleveurs félins proposent donc leurs animaux à l’âge de 2 mois. Dans une démarche d’élevage classique, où l’objectif premier est la reproduction et la cession d’animaux en bonne santé, il n’y a aucun intérêt à retarder l’âge d’adoption au-delà, d’autant que les risques sanitaires sont accrus en collectivité : plus vite un chaton rejoint sa famille adoptive, mieux c’est. En outre, sa familiarisation à l’Homme n’est alors pas l’objectif premier : plus le chaton est jeune lors de son adoption, plus son caractère demeure encore un peu flexible, ce qui permet à sa famille adoptive de prendre en charge cet aspect (même si en fait une bonne partie se joue avant l’âge de 2 mois).
Toutefois, au-delà du sevrage alimentaire, il faut prendre en compte aussi le sevrage comportemental, c’est-à-dire l’âge auquel un chaton est bien éduqué. Cette notion n’est pas évidente à définir, car le chat est un animal hautement autonome et indépendant. Néanmoins, il a besoin de profiter de l’éducation prodiguée par sa mère et de bénéficier durant plusieurs semaines de longs moments de jeux et d’interaction avec ses semblables. Au cours de cette période, il acquiert les codes de communication de son espèce via toutes sortes d’interactions avec sa fratrie ainsi qu’avec des chats adultes de l’élevage - surtout des femelles, car ce sont elles qui s’impliquent le plus, y compris pour des chatons qui ne sont pas les leurs.
Cette phase de socialisation du chaton peut être considérée comme relevant à part entière du sevrage, car elle lui confère une certaine autonomie. C’est en tout cas une phase cruciale de son développement. Dès lors qu’elle est convenablement menée, il possède à l’âge de 2 mois un niveau d’éducation suffisant pour une future vie à la campagne, dans laquelle il dispose d’un accès libre à l’extérieur.
En particulier, il se montre alors particulièrement méfiant. Ce trait de caractère déplaît à beaucoup d’humains mais relève de l’inné, et correspond tout simplement à un instinct de survie qu’on retrouve chez la plupart des autres espèces. En effet, même s’il existe des exceptions (à l’image par exemple du chien), la plupart des animaux redoutent et fuient les espèces plus grosses, qu’ils considèrent – à tort ou à raison - comme des prédateurs potentiels. Ceci explique que beaucoup de chats ne se laissent pas approcher facilement par les humains, qu’ils voient comme de gros animaux et dont par conséquent ils se méfient.
Dans le cas d’un individu disposant d’un accès libre à l’extérieur, il vaut mieux que cette méfiance n’ait pas été trop altérée par un contact très étroit avec l’Homme durant son sevrage, au risque de ne pas le voir revenir : vol, accident… Ceci explique d’ailleurs qu’un chaton issu de notre élevage n’est pas vraiment fait pour une telle vie.
En revanche, s’il est destiné à vivre uniquement en intérieur (comme c’est typiquement le cas si son propriétaire est un citadin), mieux vaut que son tempérament soit différent, au risque que la cohabitation soit difficile pour tout le monde : on le souhaite alors familier et proche de ses maîtres, pas du tout fuyant, acceptant de se laisser manipuler par n’importe qui. En outre, contrairement à ses congénères qui ont tout le loisir d’user leurs griffes au dehors, lui doit savoir se contenter des griffoirs et arbres à chat mis à sa disposition, et ne pas détériorer le mobilier de ses propriétaires.
Par conséquent, dès lors qu’on propose des chatons destinés à vivre en intérieur, l’objectif premier n’est plus d’en produire le plus possible et qu’ils soient éduqués principalement via les rapports avec leurs semblables, mais de se cantonner à un nombre restreint de bébés et de s’investir soi-même fortement pour les éduquer et les conditionner à leur vie future. Ce travail doit commencer dès l’âge de 2 à 3 semaines et se poursuivre jusqu’à environ 3 mois. Dans l’intérêt de tous, il n’est pas souhaitable de le céder plus tôt.
Ainsi, l’âge idéal pour adopter un chaton est fonction de son mode de vie futur et du type d’élevage dont il est issu. L’idéal est en tout cas que l’environnement dans lequel il a grandi, en particulier pour ce qui concerne l’accès ou non à l’extérieur, corresponde à celui du foyer qu’il rejoint une fois adopté.
L’adoption d’un chat peut effectivement s’accompagner d’un ou plusieurs problèmes, qui parfois suffisent à gâcher complètement un événement qui aurait dû être une source de bonheur. Cela dit, il est courant que l’animal soit accusé à tort par ses nouveaux propriétaires d’avoir des problèmes, alors que ces derniers relèvent simplement d’une mauvaise connaissance du comportement naturel et des besoins de leur nouveau compagnon.
Par exemple, beaucoup de personnes qui connaissent mal les chats s’attendent à un caractère similaire à celui du chien. Or, il n’en est rien. Si dans notre cas l’éducation très particulière des chatons que nous proposons rend par bien des aspects leur tempérament assez proche de celui des chiens, notre mode d’élevage relève plus de l’exception que de la règle générale. En temps normal, un chat est indépendant, méfiant, aime la tranquillité et ne recherche pas le contact humain, sauf par intérêt (on dit d’ailleurs à juste titre qu’il est opportuniste). Un adoptant qui pense que son chat a un problème car il n’est pas assez proche de lui aurait dû acheter un chien, ou bien s’adresser à un élevage comme le nôtre. À l’inverse, les personnes qui font l’acquisition d’un de nos chatons ne doivent pas considérer qu’il s’agit d’un problème si celui-ci gratte à la porte de leur chambre pour venir avec eux la nuit : en effet, il a été conditionné pour apprécier et rechercher la présence humaine, un peu comme un chien.
Par ailleurs, les félins ont besoin de beaucoup dormir, d’autant plus lorsqu’ils sont jeunes - et pour le coup, la façon dont ils sont éduqués n’y change rien. Ne pas respecter le rythme biologique d’un chaton et ne pas le laisser se reposer autant que nécessaire peut déboucher sur des tragédies. De ce fait, la présence dans le foyer de jeunes enfants turbulents peut être une vraie source de problèmes.
En outre, beaucoup de gens ignorent que les chats sont « programmés » pour aller chasser dehors. Il est impossible de leur faire perdre cet instinct, et il arrive fréquemment qu’un chaton ne parvienne pas à s’adapter à la vie en appartement, avec à la clef des troubles comportementaux majeurs et insolubles. Or, il ne s’agit là ni d’un problème relatif au chat lui-même, ni à l’élevage dont il provient. Certes, un travail de conditionnement comportemental comme celui que nous effectuons dès les premières semaines met en sommeil ce besoin d’aller dehors, et les animaux que nous proposons sont parfaitement adaptés à la vie en intérieur, mais ceci reste fragile. En effet, cette inhibition peut être rapidement réduite à néant si le chat commence à avoir la possibilité de se rendre en extérieur, ce qui est notamment susceptible de se produire lorsqu’il est laissé à un tiers pendant les vacances. Bien entendu, nous mettons en garde les adoptants sur ce risque, mais tout le monde ne suit pas toujours les conseils prodigués. Dans certains cas, les maîtres doivent même finir par se résoudre à céder leur animal à une personne ayant un jardin, tant celui-ci ne supporte plus l’enfermement après avoir pris goût à la liberté.
Sauf que ce n’est pas non plus une solution idéale : le revers de la médaille du fait que nos chatons ont été conditionnés à une vie en intérieur et à de nombreux contacts avec les humains est qu’ils sont plus vulnérables que leurs semblables s’ils se retrouvent au dehors. Normalement, un chat fuit au moindre danger et ne se laisse pas attraper : cela limite forcément les risques qu’il se fasse par exemple voler ou renverser… Or, il en va autrement avec un individu dont la méfiance a été inhibée. Certains acquéreurs nous cachent d’ailleurs le fait que leur chaton aura accès à un jardin (dont forcément il sortira), car ils savent que nous ferions alors tout pour les dissuader de prendre un chaton chez nous. Il arrive qu’ils aient par la suite à en pleurer les conséquences…
Au-delà de ces issues parfois dramatiques, les quelques jours d’acclimatation qui sont généralement nécessaires au chaton après avoir quitté l’élevage sont régulièrement source d’angoisse pour les nouveaux maîtres. Il ne faut pas perdre de vue en effet que le chat est un animal territorial, qui n’aime pas les changements de lieux. Avant qu’il ne trouve ses marques, dépose son odeur un peu partout et intègre son nouvel environnement, il reste parfois caché plusieurs heures voire plusieurs jours : le cas échéant, ceci ne manque pas d’inquiéter les adoptants, et ce à juste titre (il pourrait rapidement dépérir). D'ailleurs, dans une telle situation, le fait que des humains cherchent à le prendre pour le rassurer est en fait souvent une source supplémentaire de stress pour lui ; mieux vaut le laisser trouver ses marques à son rythme, ne pas le forcer à quitter son abri, et lui laisser sa nourriture près de là où il se cache. Les chatons que nous proposons sont ultra sociables et ne posent pas vraiment ce genre de problème (tout au plus certains ont besoin d’environ 24 heures d’adaptation), mais c’est un point qui revient assez souvent de façon générale, et donc qu’il me semblait bon d’évoquer.
Un dernier problème, et non le moindre, est celui de l’ennui qui menace les animaux de compagnie. C’est particulièrement vrai pour les chiens, mais les chats sont loin d’être épargnés. Certes, dans la nature, ils vivent seuls et n’interagissent avec des congénères que pour s’accoupler ou se battre. Toutefois, comme ils vivent dehors, tous leurs sens sont sollicités. Ce n’est pas le cas en captivité, et de ce fait beaucoup s’ennuient. Les chatons que nous proposons ont été conditionnés pour ne pas souffrir de la vie en intérieur : c’est une bonne chose, mais cela n’enlève rien au fait qu’ils peuvent mal vivre le fait de se retrouver seuls toute la journée car leurs maîtres sont absents – d’autant qu’ils entretiennent souvent une grande proximité avec ces derniers.
De fait, quels que soient la manière dont ils ont été éduqués et le cadre dans lequel ils ont passé leurs premières semaines de vie, l’isolement induit chez certains chats des troubles du comportement plus ou moins graves. Ces derniers se manifestent progressivement à partir de la maturité sexuelle et affectent environ 15 à 20 % de ceux qui se retrouvent seuls en journée. C’est pourquoi les comportementalistes félins conseillent, comme d’ailleurs pour les chiens, d’avoir deux chats : cela ne complexifie pas forcément énormément les choses pour le maître (d’autant que la plupart des accessoires peuvent servir pour les deux compères à la fois), et n’apporte généralement que des bénéfices aux intéressés. En effet, les interactions avec leur semblable permettent de rompre la monotonie dans un environnement de vie artificiel qu’est l’intérieur d’une habitation humaine. Pour peu qu’ils aient été adoptés en même temps, il n’y a généralement aucun problème de cohabitation.
En tout état de cause, nombre de personnes ayant été confinées pendant la crise sanitaire de la Covid-19 en 2020 et 2021 ont eu du mal à vivre quelques semaines d’isolement. Celles-ci doivent aisément comprendre combien se retrouver à vie coupé de ses semblables peut être pénible pour un animal, quand bien même c’est la situation qu’il connaît depuis presque toujours.
Contrairement aux animaux sauvages, les animaux de compagnie issus de la domestication sont dépendants de l’Homme pour bien des aspects. Le premier qui vient à l’esprit est bien sûr l’alimentation, mais par exemple leur capacité de reproduction est également affectée – soit qu’ils soient stérilisés, soient que leurs accouplements soient orientés par les humains. Cette dépendance est également imposée à certains animaux sauvages (oiseaux, poissons…) que nous maintenons en captivité à nos côtés pour notre plaisir, notre distraction, leur beauté, leur chant…
De nombreux scientifiques s’accordent toutefois sur l’idée qu’en cas de disparition soudaine des humains, le chat serait une espèce particulièrement bien disposée au marronnage, c’est-à-dire au retour à l’état sauvage. En revanche, nombre de races de chiens disparaîtraient, car l’espèce canine est dans l’ensemble très dépendante de l’Homme pour sa survie (sans pour autant qu’il soit possible de généraliser, comme le montre par exemple le cas des chiens errants).
Ainsi, un chat n’a aucunement besoin de l’Homme pour vivre. Pourtant, on l’enferme dans un foyer, pour notre simple agrément. Dès lors, la moindre des choses serait de veiller à lui procurer un maximum de bien-être, une vie la plus acceptable possible au sein de notre environnement très artificiel.
Cela dit, le monde change, et de plus en plus de personnes sont sensibles au respect de la vie animale. Mais n’y a-t-il pas du deux poids deux mesures ? Par exemple, garder en cage un oiseau est désormais considéré par le plus grand nombre comme une maltraitance évidente. Mais combien de maîtres ne se rendent pas compte qu’enfermer leur chien ou leur chat sur un balcon, l’attacher dans le jardin ou même tout simplement le faire vivre dans un studio sans accès à l’extérieur conduit à le faire souffrir ?
De fait, bien qu’ils soient très proches de nous, peu de personnes connaissent vraiment la psychologie et les besoins de nos compagnons domestiques. C’est particulièrement vrai pour le chat, qui est plus difficile à cerner. Or, une erreur répandue consiste à adopter un chat plutôt qu’un chien pour s’éviter la corvée des promenades trois fois par jour. Trop de personnes pensent que puisqu'un chat fait ses besoins dans un bac à litière et qu’il n’est pas nécessaire de prendre du temps plusieurs fois par jour pour le sortir, il est l’animal idéal pour accompagner nos vies modernes souvent bien occupées.
Pourtant, un chat n’a rien à voir avec un chien, et beaucoup de choses les opposent. C’est un animal indépendant et par nature méfiant, habitué à la vie en extérieur, heureux et épanoui lorsqu’il a accès à tout moment à un jardin (même petit). Or, la majorité des gens vivent en milieu urbain et dans des petites surfaces, qu’il s’agisse de maison sans terrain digne de ce nom ou d’appartement. Certes, la présence d’un balcon peut améliorer les choses (sous réserve bien sûr de bien le sécuriser avec un filet, pour éviter les chutes), et il est possible de pallier le manque de surface au sol en aménageant l’espace de manière verticale (un chat doit pouvoir grimper). Toutefois, cela risque de ne pas être suffisant si l’animal n’a pas été habitué à vivre dans un tel environnement dès le début de son sevrage, c’est-à-dire dès ses premières semaines.
Par conséquent, nous conseillons aux personnes vivant en appartement de privilégier les très rares élevages qui éduquent leurs animaux directement au sein de leur foyer au sein d’un logement de ce type, plutôt que par exemple un élevage à la campagne où ils sont installés dans un bâtiment distinct (une chatterie). Les chatons n’ayant connu que ce mode de vie et ayant été en contact permanent avec l’éleveur sont nettement plus familiers et aptes à passer leur existence entre quatre murs. Il peut être nécessaire de s’armer de patience, car ses animaux sont produits en nombre très limité : les délais d’attente sont chose courante, et souvent supérieurs à six mois. Mieux vaut néanmoins en passer par là, plutôt que de se précipiter pour adopter le premier chat venu et risquer d’aboutir à une situation intenable pour tout le monde.
Au contraire, nous conseillons aux personnes qui prévoient de permettre à leur compagnon d’accéder à l’extérieur de s’adresser à des éleveurs plus traditionnels : le chaton obtenu aura un tempérament davantage méfiant, ce qui le protégera de nombre de risques du dehors.
Dans tous les cas, mieux vaut éviter les animaleries et privilégier les élevages professionnels : étant l’objet de diverses réglementations et de contrôles, ils offrent de meilleures garanties de sérieux et de qualité. Pour autant, cela ne dispense pas de se rendre sur place, visiter les locaux, être attentif aux conditions d’hygiène (par exemple, une odeur d’urine est le signe de lacunes indéniables en la matière) et vérifier si les animaux ne sont pas trop farouches. Internet foisonne de petites annonces alléchantes proposant des animaux à bas prix, mais il faut être méfiant si l’on choisit cette solution : les arnaques, élevages clandestins et autres trafiquants d’animaux y sont nombreux. Se rendre dans l’élevage avant toute adoption relève donc du bon sens, tout comme le fait de ne jamais envoyer d’argent sans avoir pu voir le chaton, et celui d’acheter seulement un animal vendu dans les règles : il doit être âgé d’au moins 2 mois, identifié par puce électronique et accompagné d’un certificat vétérinaire attestant qu’il est en bonne santé. Par ailleurs, dès lors qu’il est présenté comme étant « de race », il doit être détenteur d’un pedigree qui atteste de ses origines (en France, celui-ci est délivré par le LOOF – Livre Officiel des Origines Félines).
Tout adoptant doit d’ailleurs avoir conscience qu’un chat de race peut s’avérer fort onéreux, a fortiori s’il est issu d’un éleveur prestigieux ou qui s’investit fortement dans l’éducation des chatons. En la matière, qualité et prix bas ne vont pas de pair. Toutefois, vu que les premières semaines de vie (c’est-à-dire la période précédant l’adoption) déterminent largement le caractère qu’aura l’animal tout au long de son existence, ce montant parfois élevé n’est pas un investissement vain, en particulier si celui-ci a besoin au préalable d’une éducation aux petits oignons afin d’être apte à vivre en intérieur. Une personne ayant des moyens financiers restreints et qui rechercherait simplement le prix le plus bas risquerait fort d’être déçue et confrontée à toutes sortes de problèmes au cours des années qui suivent : mieux vaut pour elle se tourner vers les refuges, où on trouve des animaux de tous âges et de tout caractère.
En tout état de cause, la question des moyens financiers doit forcément se poser lors d’une adoption, et il ne faut pas raisonner en se cantonnant seulement au prix d’achat. En effet, celui-ci représente le plus souvent moins de 10% des dépenses occasionnées tout au long de son existence. Sur la durée, les dépenses liées à son alimentation, son entretien, ses accessoires ou encore sa santé (vermifuges, rendez-vous chez le vétérinaire, médicaments…) représentent un montant bien plus conséquent que ce qu’il faut verser pour l’acquérir, fusse-t-il de race et issu d’un très bon élevage.
Concernant la nourriture, il faut fuir comme la peste les produits industriels à bas prix, et opter pour une meilleure qualité. Cela implique un budget d’au minimum 3 euros par jour - soit 1100 euros par an, ou 15 à 20.000 euros sur l’ensemble de la durée de vie de l’animal.
À ces montants viennent s’ajouter les incontournables frais vétérinaires : il n’y a pas que la vaccination à prévoir à ce niveau, car comme les humains, les animaux sont des êtres vivants et tombent parfois malades ou se blessent. Le montant varie très fortement d’un individu à l’autre et d’une année à l’autre en fonction de l’état de santé général du chat et d’éventuels coups du sort, mais il représente plusieurs centaines d’euros par an – et peut dépasser le millier en cas d’accident ou maladie nécessitant des traitements coûteux.
Enfin, il faut aussi anticiper toutes sortes de dépenses liées au toilettage, aux accessoires, à la garde lorsqu’il n’est pas possible de l’emmener avec soi, etc.
Ainsi, un animal coûte fort cher et représente un engagement financier sur une longue durée : il faut en être conscient au moment d’adopter. Ceci explique d’ailleurs qu’un prix d’achat élevé ne devrait pas être un frein à l’adoption, dès lors qu’il est justifié : rareté de la race, reproducteurs primés en expositions, important travail d’éducation effectué par l’éleveur...