Les chats sont connus entre autres pour leur souplesse et leur agilité : ils n'ont pas leur pareil pour faire des bonds impressionnants, se faufiler sous des meubles ou dans des endroits étroits, marcher en équilibre sur des rebords, se retourner dans les airs pour atterrir sur leurs pattes...
Toutefois, comme les humains, ils peuvent souffrir de troubles articulaires, et ceux-ci sont susceptibles de fortement les handicaper. C'est le cas en particulier de l'arthrose : cette maladie courante, en particulier au-delà d'un certain âge, altère peu à peu la capacité à faire certains gestes, voire carrément à se mouvoir.
En quoi consiste-t-elle exactement, et quels sont ses symptômes ? Certains chats sont-ils davantage à risque ? Quels traitements peut-on mettre en place, et est-il possible d'en prémunir son petit félin ?
L'arthrose est une maladie dégénérative qui conduit à une destruction progressive et irréversible du cartilage présent dans les articulations, et in fine à une destruction de ces dernières. Elle entraîne de ce fait une perte de mobilité du ou des membres atteints, ainsi que des douleurs chroniques.
Son nom médical complet est ostéoarthrose, un terme construit à partir des mots grecs « osteon » et « arthron », qui signifient respectivement « os » et « articulation ».
L'arthrose est très fréquente chez les humains, ainsi que chez les chiens et probablement de nombreuses autres espèces. Chez les chats, elle a longtemps été considérée comme rare, mais cela était lié au fait qu'ils sont fortement enclins à cacher le fait qu'ils souffrent : des études récentes ont montré qu'en réalité, elle est très répandue au sein de la gent féline. Par exemple, dans le cadre d'une thèse intitulée « Étude de la prévalence et des facteurs de risque d'arthrose chez le chat domestique par l'utilisation d'outils cliniques métrologiques : enquête auprès de 1280 propriétaires en France métropolitaine » et réalisée en 2024, une enquête a été réalisée auprès de propriétaires de chats en France : il en est ressorti que l'arthrose touchait 24% des chats étudiés, et que sa prévalence augmente fortement avec l'âge.
Par ailleurs, la plupart des articulations sont susceptibles d'être affectées. Néanmoins, dans la pratique, ce sont les genoux, les coudes, les hanches et la colonne vertébrale qui sont le plus concernés chez les chats.
Les articulations correspondent aux jointures entre plusieurs os : ce sont elles qui permettent à ces derniers de bouger les uns par rapport aux autres, et donc qui rendent possibles les mouvements. Elles sont composées entre autres de cartilage, un tissu mou et souple qui joue le rôle d'amortisseur pour limiter les frottements sur les os.
Le cartilage est soumis à beaucoup de tensions, mais comme les autres tissus de l'organisme, il est capable de se restaurer. Il arrive toutefois que les cellules chargées de réparer les lésions dysfonctionnent. Cela se produit soit du fait d'efforts trop importants sur les articulations, soit du fait que le cartilage est fragilisé (souvent tout simplement à cause du vieillissement). Quel que soit le cas de figure, ce dysfonctionnement est à l'origine d'une inflammation qui elle-même occasionne des dégâts : il en résulte ainsi un véritable cercle vicieux, puisque le cartilage s'auto-détruit peu à peu.
Mais l'arthrose ne s'arrête pas là. En effet, là où le cartilage est dégradé, les os frottent les uns sur les autres lors des mouvements, ce qui à plus ou moins long terme finit par les abîmer. Leur extrémité change alors de forme : on observe couramment des excroissances osseuses appelées ostéophytes. Ces dernières empêchent les mouvements de se faire correctement : ils perdent en amplitude, deviennent raides et douloureux... À terme, ils peuvent ne même plus être possibles, car toute l'articulation finit par être largement détériorée.
Diverses causes peuvent entraîner un dysfonctionnement des cellules réparatrices du cartilage, et ce faisant être à l'origine de l'arthrose.
Au sein de la gent féline, les plus courantes sont :
En théorie, n'importe quel chat peut être atteint d'arthrose, quel que soit son âge ou sa race. Dans la pratique, certains sont tout de même bien plus à risques que d'autres.
De ce que l'on sait aujourd'hui, les individus les plus prédisposés à l'arthrose seraient :
Cela dit, ce n'est pas parce qu'un petit félin n'entre dans aucune de ces catégories qu'il ne peut pas être atteint par l'arthrose : il a simplement moins de risques de l'être, toutes choses égales par ailleurs.
Au passage, il convient de souligner que contrairement à ce que l'on observe chez les chiens et même chez les humains, il ne semble pas exister de prédisposition liée au sexe ou au surpoids chez les chats, en tout cas pour ce que l'on en sait aujourd'hui.
L'arthrose n'est pas facile à repérer, car elle reste longtemps peu symptomatique - voire même asymptomatique, étant donné qu'au début elle ne cause aucune douleur.
En outre, un chat a généralement tendance à masquer sa douleur : c'est lié au fait que, contrairement par exemple à un chien, il a tôt fait d'être pris pour cible par des carnivores plus gros que lui, a fortiori s'il montre des signes de faiblesse. Il est ainsi moins enclin à boiter ou à émettre des vocalises pour se plaindre, même si cela peut arriver. Il est donc souvent difficile de se rendre compte qu'il souffre lorsqu'il effectue certains mouvements.
Une baisse des capacités physiques et/ou du niveau d'activité doit toutefois alerter, car il s'agit d'un symptôme fréquent d'arthrose. Par exemple, le chat peut avoir plus de mal à effectuer des sauts qu'il réalisait sans difficulté jusque-là : il fait alors des bonds plus courts ou moins hauts. Il peut aussi se montrer plus réticent à courir, grimper, monter ou descendre les marches... ou même tout simplement à marcher longtemps. Tout ceci entraîne d'ailleurs un autre symptôme de l'arthrose, observable à plus ou moins long terme : une perte de musculature, en particulier au niveau des pattes arrière.
Par ailleurs, il peut soudainement devenir malpropre et faire ses besoins à côté de sa litière ou même dans un autre endroit de sa maison, s'il ne parvient plus à accéder à son bac.
Il est également courant d'observer des changements dans ses habitudes de toilette. Par exemple, il peut se mettre à se lécher ou se mordiller incessamment au niveau de certaines zones bien précises de son corps, notamment celles qui lui font mal. En outre, les raideurs articulaires peuvent l'empêcher de faire sa toilette aussi souvent ou méticuleusement que d'habitude, voire de la faire tout court : son pelage devient alors rapidement sale, terne et/ou ébouriffé.
Dans un autre registre, il peut avoir tendance à moins manger, car la douleur entraîne souvent une diminution de l'appétit.
Enfin, un chat souffrant d'arthrose devient souvent nerveux, irritable voire agressif, en particulier lorsqu'on le caresse au niveau d'une zone touchée par l'arthrose (le plus souvent le dos ou l'arrière-train).
L'arthrose est souvent difficile à remarquer chez un chat, car elle ne cause pas forcément de symptômes aussi parlants que chez un chien ou un humain. Certains changements de comportement peuvent cela dit alerter et amener à consulter. Différents examens sont alors nécessaires pour confirmer le diagnostic.
Généralement, le vétérinaire commence par procéder à un examen attentif du chat : il palpe et manipule délicatement ses membres, son dos et ses articulations pour tenter de détecter des signes d'arthrose (par exemple une chaleur ou un gonflement anormal) ou identifier une autre cause qui pourrait expliquer ces symptômes (une blessure, une fracture...).
Dans un second temps, il procède à des examens d'imagerie pour observer l'état des articulations et ainsi confirmer le diagnostic, mais aussi évaluer la sévérité des lésions. Selon le contexte, il peut s'agir de radiographies, d'un scanner, d'IRM ou même d'échographies.
Chez les chats comme chez les autres espèces, l'arthrose est incurable : les dégâts sur le cartilage et le reste de l'articulation ne sont pas réversibles. En outre, il n'existe pas vraiment de moyen de stopper son évolution. Le traitement consiste donc surtout à soulager la douleur, à ralentir la progression de la maladie autant que faire se peut, et à tout mettre en oeuvre pour que l'animal puisse vivre à peu près normalement.
Il passe généralement par l'administration de médicaments (notamment des anti-douleurs), de compléments alimentaires et/ou un changement de mode de vie. En revanche, contrairement à ce que l'on observe par exemple chez les chiens, on recourt rarement à des injections ou à une opération chirurgicale. Quoi qu'il en soit, le vétérinaire définit le protocole qui lui semble le meilleur en fonction notamment des symptômes présents.
Le traitement de l'arthrose peut représenter un budget conséquent sur la durée, d'autant que même si on avait veillé à assurer la santé de son chat, il y a peu de chances que l'assurance prenne en charge les dépenses correspondantes - a fortiori lorsque le problème est causé par le vieillissement et survient donc tard dans la vie du petit félin.
L'arthrose est une maladie douloureuse : c'est même d'ailleurs un de ses principaux problèmes. À défaut de pouvoir la guérir, le traitement vise à atténuer la souffrance de l'animal, et cela se fait le plus souvent à l'aide de médicaments.
Les plus utilisés sont les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Ils ont un effet antalgique (c'est-à-dire qu'ils soulagent la douleur) mais aussi un effet anti-inflammatoire, ce qui leur permet de contribuer à atténuer l'inflammation responsable de la dégradation du cartilage.
Les médicaments de ce type sont globalement efficaces, mais ils présentent l'inconvénient d'occasionner fréquemment toutes sortes d'effets secondaires, a fortiori si on les utilise en continu. Certains de ces effets peuvent même s'avérer graves : en particulier, il existe un risque de troubles rénaux ou d'ulcère gastrique. Cela explique que les anti-inflammatoires sont souvent utilisés en début de soin et sur une courte période, afin de soulager l'animal le temps de mettre en place d'autres traitements moins agressifs.
Quoi qu'il en soit, un suivi doit être mis en place afin de vérifier que le chat supporte bien les médicaments, et ajuster la posologie - voire changer de molécules - si jamais ce n'est pas le cas.
Toutes sortes de compléments alimentaires entendent contribuer à ralentir la progression de la maladie et soulager les douleurs d'un chat atteint d'arthrose. En effet, certaines substances ont la réputation d'aider à renforcer le cartilage et/ou à réduire les inflammations.
Les compléments alimentaires pour un chat souffrant d'arthrose ont des compositions assez variées. Néanmoins, les ingrédients les plus utilisés sont les oméga-3, la glucosamine, la chondroitine, la curcumine, le collagène ainsi que l'acide hyaluronique. Ces produits sont généralement commercialisés sous forme de comprimés, ou bien incorporés dans des croquettes spécialement conçues pour les petits félins atteints de troubles articulaires.
Peu de travaux de recherche ont été réalisés sur l'efficacité de telles substances, a fortiori lorsqu'elles sont administrées par voie orale. En 2022, une méta-étude publiée dans l'International Journal of Molecular Sciences et intitulée « A 2022 Systematic Review and Meta-Analysis of Enriched Therapeutic Diets and Nutraceuticals in Canine and Feline Osteoarthritis » s'est attachée à faire la synthèse des travaux réalisés sur le sujet par le passé : elle conclut que les oméga-3 présenteraient une certaine efficacité pour diminuer la douleur causée par l'arthrose, mais que l'efficacité des autres substances serait faible voire inexistante.
Cela dit, ce genre de compléments alimentaires ont l'avantage de ne provoquer que peu - voire pas du tout - d'effets secondaires : par conséquent, il n'est normalement pas dangereux de faire un essai pendant quelques mois, pour voir si l'état du chat s'améliore. Mieux vaut toutefois en discuter au préalable avec son vétérinaire, au cas où il existerait des contre-indications.
En parallèle du recours à des médicaments et/ou à des compléments alimentaires, suivre certaines règles au quotidien aide un chat souffrant d'arthrose à conserver ou regagner une qualité de vie correcte, et peut aussi aider à freiner l'évolution de la maladie. Ils sont d'autant plus utiles si les différents traitements ne donnent que des résultats limités.
Tout d'abord, il faut veiller à ce qu'il soit bien installé au domicile et puisse s'y déplacer facilement. Cela implique par exemple de :
En parallèle, et même si cela peut paraître contre-intuitif, il est important de continuer à lui faire faire de l'exercice, car les muscles aident à maintenir les articulations bien en place. Les activités choisies doivent toutefois être de faible intensité, pour ne pas risquer de le blesser : on peut par exemple stimuler son instinct de chasse simplement en agitant un bâton ou une ficelle devant lui.
Enfin, même si le poids ne semble pas avoir une influence aussi importante sur le développement de l'arthrose chez un chat que chez un chien ou un humain, il est conseillé de veiller à ce qu'il conserve son poids idéal, ou de le faire maigrir s'il est en surpoids. Il ne faut pas hésiter à solliciter un vétérinaire en cas de doute ou pour recevoir de l'aide à ce niveau.
L'arthrose n'est pas une maladie mortelle : elle ne tue pas directement un chat qui en est atteint. Si la douleur est correctement prise en charge, elle n'altère même pas forcément tant que cela ses conditions d'existence et ne l'empêche pas de vivre à peu près normalement - du moment que l'on prend soin d'organiser son quotidien en conséquence. C'est d'autant plus vrai si elle se manifeste alors qu'il a déjà un certain âge, car il a alors toutes les chances de décéder d'une autre cause avant qu'elle ne devienne vraiment très handicapante.
Néanmoins, il peut arriver que les traitements mis en place ne permettent pas de soulager efficacement ses douleurs, au point que celles-ci sont vraiment très pénibles pour lui - voire insupportables. Le cas échéant, faire euthanasier son chat est parfois la moins mauvaise solution pour lui éviter de souffrir. En tout état de cause, une décision aussi lourde est à prendre après une discussion approfondie avec le vétérinaire.
Par ailleurs, l'arthrose peut être la conséquence d'un problème de santé susceptible d'affecter directement l'espérance de vie. C'est le cas par exemple de l'ostéochondrodysplasie, du moins dans certains cas précis - heureusement rares.
L'arthrose est assez difficile à prévenir chez les chats, dans la mesure où elle semble peu liée à l'hygiène de vie (bien moins par exemple que chez les chiens). Néanmoins, il est probable que certains conseils utiles pour garder son animal en bonne santé permettent aussi de réduire les chances qu'il développe un jour de l'arthrose - ou en tout cas, qu'il en développe tôt dans sa vie.
On peut citer en particulier le fait de :
Ces quelques conseils ne garantissent assurément pas un risque zéro, mais ils aident de toute façon à garder son chat en bonne santé le plus longtemps possible.
L'arthrose est une maladie fréquente qui cause une destruction progressive et irrémédiable du cartilage, et même des articulations dans leur ensemble. En plus d'être douloureuse, elle empêche peu à peu le chat de faire certains mouvements, voire à terme de se mouvoir efficacement.
Il n'existe aucun moyen de la soigner, mais certains traitements peuvent être mis en place pour limiter les douleurs et ralentir sa progression. Cela dit, dès lors qu'elle est prise en charge suffisamment vite et correctement, elle n'empêche pas forcément l'animal de conserver une qualité de vie correcte - a fortiori s'il est déjà âgé lorsqu'elle apparaît.
En tout cas, l'arthrose n'est pas la seule pathologie à pouvoir détériorer les articulations : c'est le cas aussi par exemple de l'arthrite. Celle-ci provoque des symptômes similaires, au point que les deux sont souvent confondues. Pourtant, leurs causes ainsi que les traitements à mettre en place diffèrent assez largement.
