Au 13e jour du blocus des pêcheurs, 200 personnes sont au chômage technique au marché de Saumaty
Depuis 12 jours, Saumaty est un marché fantôme. En raison du blocus des pêcheurs, le MIN est privé de son approvisionnement.
Photo Jérôme Liégeois
Pour la première fois de leur vie, les chats de Saumaty ont faim. Douze jours que ces hordes de félins obèses, engraissés aux restes des 10 à 20 tonnes de poisson qui s'échangent chaque soir sur la halle à marée, n'ont plus une arête à se mettre sous la dent… Douze jours que les pêcheurs de Marseille, Fos, Sète et Port-de-Bouc tiennent le blocus pour protester contre l'augmentation du prix du gazole.
Douze jours que les chalutiers sont à quai, que les hangars restent vides et les camions sans cargaison. Le chômage technique pour près de 200 personnes. Par solidarité avec les pêcheurs, par peur de la casse aussi, la Somimar a décidé de ne pas s'approvisionner en denrées du Maroc ou du Sénégal. Jeudi, sur le carré des mareyeurs, seules les dorades d'élevage du Frioul étaient mises à l'emballage. Mais malgré la pénurie de poisson frais, les commandes s'effondrent: "les magasins ont peur que la marchandise soit déversée".
Et si quelques petits pêcheurs ont repris la mer ces jours-ci, eux aussi peinent à écouler leur production auprès des poissonneries et des restaurateurs. "Les gens savent que les pêcheurs sont en grève, et ils ont des doutes sur la fraîcheur du poisson", analyse Ahmed, qui a dû jeter du merlan cette semaine. "On n'a jamais vu ça à Saumaty", se lamente Jean-Claude Esposito. Ce mareyeur craint "l'asphyxie complète de la filière". Après l'échec des négociations à Bruxelles, la maison Esposito voit poindre la menace du "dépôt de bilan" et du chômage pour ses 10 salariés: "On est comme une lumière qui s'éteint peu à peu".
Il y a 20 ans, 30 chalutiers et 42 mareyeurs travaillaient à Marseille. Les derniers survivants de la crise de la pêche -5 chalutiers, 7 mareyeurs- commencent à croire qu'un de ces jours, il n'y aura plus un chat à Saumaty.
