C’est un quartier paisible et résidentiel où tout le monde se connaît. Un morceau de ville en lisière de campagne. Depuis quelques mois, le quartier de la Bombazine, à Payerne, est devenu une sorte de triangle des Bermudes pour félins. Les chats y disparaissent les uns après les autres. «C’est dégueulasse. C’est pour les manger ou pour leur peau qu’ils nous ramassent nos animaux», soupire Antonella Jutzeler. Elle a perdu deux jolis chats. Trois maisons plus loin, Claude et Serge sont consternés. Isis et Bijou , leurs boules de poils de 1 an, ont disparu à quelques jours d’intervalle en septembre. (Photo)
Même sort pour Miga , le chat du voisin. «Il venait jouer avec les nôtres, adorable. Il s’est aussi fait ramasser peu après», explique Serge.
Rues du Pavement, des Thuyas, de la Plaine ou du Chasseron, ce sont plus de dix félins qui ont disparu en quelques semaines, cet automne à la Bombazine. «Ça fait vraiment beaucoup pour un seul quartier, observe la vétérinaire Catherine Etter, qui entend les doléances des propriétaires. Il peut y avoir des explications naturelles pour certains cas. Mais à une telle échelle, on ne peut qu’envisager un geste malintentionné.»
«Un habitant excédé»
Malgré la multiplication d’avis de recherche et d’innombrables enquêtes de voisinage, aucun propriétaire n’a retrouvé son animal. Pas même un cadavre, une dépouille. De quoi alimenter les scénarios les plus funestes. «Je suis sûre qu’on a pris mon chat Scoubi pour sa fourrure, dit Lucilia Costa. Il était magnifique.»
Du côté de la Société vaudoise pour la protection des animaux (SVPA), l’administrateur Alain Zwygart y voit plutôt la main d’un habitant du coin. «Ce genre de disparitions collectives n’est pas fréquent. Mais cela arrive. L’explication la plus rationnelle, que nous privilégions, c’est qu’une personne excédée par le nombre de félins dans le quartier les attrape et les fait disparaître. Les chats font leurs besoins dans les jardins, ils urinent dans les corridors ou sur les portes. Ça peut déranger et énerver.»
Et la thèse de la consommation de viande de chat? Ou l’utilisation de sa peau? «C’est peu probable. Chacun peut manger son propre animal, dit Alain Zwygart, c’est répugnant, mais ce n’est pas illégal. Quant aux peaux, c’est interdit d’en produire et d’en commercialiser en Suisse, c’est très dur à faire tanner.»
Police impuissante
Du côté de la police, on ne peut pas faire grand-chose. Les propriétaires peuvent – et doivent – déposer une plainte pour vol. Dans notre législation, l’animal est en effet considéré comme un objet.
«Il faut que les propriétaires nous signalent tous les cas, explique Philippe Jaton, porte-parole de la police cantonale. C’est important. Lorsqu’on observe un phénomène de masse comme celui de Payerne, on va s’y intéresser. Faut-il encore qu’on nous le signale.» Idéalement, la police a besoin de pistes. Or là, malgré le nombre de disparitions, aucun indice, voiture ou comportement suspect, piège ou appât, n’a été observé dans ce quartier si tranquille. Mystère.
CHRISTIAN AEBI