Publié en 2014, Sugar, Ma vie de chat est une œuvre à part dans la bande dessinée contemporaine. Connu jusque-là pour ses illustrations et ses travaux graphiques expérimentaux, l’auteur belge Serge Baeken (né en 1967) y livre un récit profondément intime : l’histoire vraie de son chat Sugar, disparu après quinze années de vie commune. L’album s’ouvre sur cette absence et évoque avec pudeur la perte de cet être cher.
Son personnage principal est donc Sugar, est un chat noir à la silhouette souple. Grâce à un trait nerveux et expressif, son apparence mêle réalisme et abstraction. Ainsi, son pelage est granuleux et sa musculature anguleuse, mais son visage, dénué de bouche et de nez dans certaines cases, serait réduit à l’état d’ombre sans ses grands yeux jaunes au regard perçant.
Comme d’autres auteurs de son époque, Serge Baeken raconte dans Sugar, Ma vie de chat un quotidien fait de gestes simples et de rituels partagés avec l’animal, qu’il illustre dans des pages souvent dépourvues de textes.
Elle se distingue également par certains choix originaux faits par son auteur. En particulier, plutôt que de chercher à varier l’apparence des pages en utilisant des cases de taille différente, Serge Baeken choisit de les découper en 26 petites cases aux dimensions identiques, qui lui permettent de décmposer l’action. En outre, exit les couleurs : il fait le choix audacieux du noir et blanc, ce qui permet de vraiment mettre en valeur le personnage principal de son histoire.
Sugar, ma vie de chat s’inscrit dans une tendance forte de la bande dessinée des années 2010 : celle du récit biographique animalier, popularisé par des auteurs cherchant à montrer la tendresse de leur quotidien au côté de leur animal préféré. Le chat n’est alors plus le clown divertissant qu’on connaissait au 20ème siècle : c’est un être qui possède une personnalité à part entière et qu’on traite avec la même attention que s’il s’agissait d’un humain. Ainsi, avec cette bande dessinée, Serge Baeken montre que la mort d’un proche est une épreuve difficile, même lorsqu’il s’agit d’un animal.
À sa sortie, l’album est salué pour sa sincérité et sa maîtrise graphique. Il remporte d’ailleurs en Belgique le prix Saint-Michel de la meilleure bande dessinée d’un auteur néerlandophone.