Il existe à Rome une petite sculpture en marbre à échelle réelle connue sous le nom de La Gatta (« La Chatte »). Elle se trouve sur la corniche du palais Grazioli, un bâtiment construit à la Renaissance et rénové à l’époque baroque, au milieu du 17ème siècle. Celui-ci se situe à l’angle de la via del Plebiscito et de la via della gatta (« rue de la chatte »), cette dernière ayant été baptisée ainsi en l’honneur de la statue.
Bien que cette dernière ait une certaine notoriété, il est assez difficile de la repérer. En effet, elle est partiellement dissimulée par un lampadaire, et installée au premier étage (ce qu’on appelle le piano nobile, réservé aux invités les plus prestigieux) du bâtiment. En outre, avec le temps, l’érosion lui a fait perdre ses oreilles pointues, si bien qu’en l’observant depuis la rue on ne l’identifie pas forcément d’emblée comme représentant un petit félin.
Quoi qu’il en soit, son origine demeure un mystère, bien qu’il soit probable qu’elle ait été créée il y a très longtemps – plus précisément durant l’Antiquité.
En effet, au 1er siècle après J.-C., du fait de l’influence croissante dans l’Empire romain du culte de la déesse égyptienne Isis, un temple nommé Iséum fut érigé en son honneur non loin de l’actuel palais Grazioli. Très vaste, il s’étendait jusqu’au Panthéon et était décoré de sculptures : certaines importées d’Égypte, d’autres créées à Rome.
Au 15ème siècle, les pierres et le marbre des vestiges du temple furent récupérés et réutilisés pour ériger de nouveaux bâtiments. On exhuma aussi les statues qui avaient ornées le temple et ses abords, dont plusieurs obélisques qui vinrent orner les places italiennes, mais aussi, très certainement, cette sculpture de chatte.
Elle pourrait ainsi être une représentation de la déesse égyptienne Bastet, qui avait une tête de chat et incarnait la fécondité ainsi que la protection maternelle.
Quoi qu’il en soit, les Romains se sont approprié la statue, si bien que de nos jours plusieurs légendes lui sont associées. Une d’entre elles veut qu’elle aurait été placée là pour honorer l’exploit héroïque d’une chatte qui aurait miaulé pour alerter les habitants du palais d’un incendie, parvenant ainsi à attirer leur attention et leur permettre d’agir rapidement pour éteindre le feu. Une variante de cette histoire affirme que la chatte aurait miaulé pour prévenir qu’un enfant se tenait en équilibre instable sur la corniche, prêt à tomber. Enfin, d’après une autre légende, on pourrait découvrir un trésor enseveli en suivant la direction indiquée par la tête de l’animal.
Bien qu’aucune d’entre elles ne soit avérée historiquement, elles contribuent indéniablement à renforcer l’affection que portent les Romains à cette petite statue qui a traversé les siècles.