Mr. Cyrano L. Catte II, dit « Ratty », était un chat tigré roux et blanc né en 2000. Il appartenait à l’Américaine Sandra Lerner (née en 1965), cofondatrice de l’entreprise informatique Cisco Systems, avec qui il vivait à Upperville, en Virginie. Il se distinguait par son gabarit, puisqu’il affichait pas moins de 9 kg sur la balance.
Toutefois, ce n’est pas pour son poids que ce petit félin a marqué les mémoires (et en particulier celles des étudiants vétérinaires), mais parce qu’il fut le premier à bénéficier de deux grandes avancées de la médecine vétérinaire.
Ainsi, en 2010, il fut traité pour un cancer des os à l’Université d’État du Colorado avec une radiothérapie stéréotaxique, c'est-à-dire délivrant des doses élevées de rayonnements ionisants sur une cible spécifique et de manière extrêmement précise. Ce fut une première pour un petit félin.
Ce fut un succès, puisque ce traitement fit entrer le cancer en rémission complète. Toutefois, il eut aussi pour effet d’affaiblir les os de la patte arrière gauche de Ratty, provoquant au niveau de son genou des problèmes qui le faisaient manifestement souffrir et limitaient ses capacités à marcher.
Une solution aurait pu consister à l’amputer, mais elle fut écartée en raison de son poids important. En effet, sa qualité de vie aurait alors été trop affectée. À la place, une prothèse pour chat d’environ 5 cm en alliage de cobalt-chrome et plastique dense fabriquée par impression 3D fut conçue pour lui en 2012, après huit mois de modélisation et d’études.
Elle fut posée au cours d’une opération qui dura six heures et fut effectuée à l’Université d’État de Caroline du Nord à Raleigh. Le vétérinaire français Denis Marcellin-Little, professeur d’orthopédie, et l’Américain Ola Harrysson, professeur d’ingénierie industrielle, utilisèrent la technique de l’ostéo-intégration pour fusionner la prothèse avec l’os vivant, permettant ainsi une amplitude de mouvement naturelle similaire aux prothèses humaines. Là aussi, ce fut une première pour un petit félin - du moins aux États-Unis, car cela avait déjà été fait dans d’autres pays.
La prothèse et sa pose furent facturées 20.000 dollars (environ 17.000 euros) à sa propriétaire Sandra Lerner, mais le coût réel fut en réalité encore supérieur. En effet, beaucoup de temps et de matériaux furent offerts gracieusement à Ratty pour le bénéfice de la recherche.
Là aussi, le succès fut au rendez-vous : Ratty put se tenir debout dès le lendemain, et retrouva une mobilité quasiment normale après une période de repos de trois mois – hormis une légère boiterie.
Après sa mort, plus précisément en 2018, une statue à son effigie fut érigée sur le campus de l’Université d’État de Caroline du Nord. Elle le représente allongé et appuyé sur ses pattes avant, sur une table drapée dans un tissu.
Cette œuvre vise sans doute à célébrer la résilience de ce petit félin face à l’adversité, mais aussi et surtout l’innovation dans la recherche vétérinaire, source de fierté de l’université. Elle rappelle dans une certaine mesure la statue du chat expérimental de l’Université d’État de Saint-Pétersbourg qui, pour sa part, célèbre les animaux utilisés pour la recherche.