« Vieux frère », par Jules Lemaître (1880)

La page de couverture du recueil « Les Médaillons » écrit par Jules Lemaître

Texte du poème « Vieux frère »

Mon chat, hôte de ma vieille maison,

De ton dos électrique arrondis la souplesse,

Viens te pelotonner sur mes genoux, et laisse

Que je plonge mes doigts dans ta chaude toison.

 

Ferme à demi, les reins émus d’un long frisson ;

Ton œil vert qui me raille et pourtant me caresse,

Ton œil vert semé d’or, qui, chargé de paresse,

M’observe d’ironique et bénigne façon.

 

Tu n’as jamais connu, philosophe, ô vieux frère,

La fidélité sotte et bruyante du chien :

Tu m’aimes cependant, et mon cœur le sent bien.

 

Ton amour clairvoyant, et peut être éphémère,

Me plaît, et je salue en toi, calme penseur,

Deux exquises vertus : scepticisme et douceur.

Informations sur l'auteur et explications

L’écrivain français Jules Lemaître (1853-1914) n’est pas resté dans l’histoire pour ses poèmes, ses romans ou ses pièces de théâtre ; c’est plutôt sa pensée critique qui retient l’attention. Il faut dire que tout au long de son œuvre, il amuse et charme le lecteur avec sa verve et son esprit brillant, sans pourtant jamais prendre parti dans l’absolu pour une idéologie en particulier : il préfère jouer avec des idées parfois très différentes les unes des autres, au gré des caprices de sa fantaisie.

 

Il semble que ce soit ce rejet du concept de vérité unique qui motive sa dévotion envers les félins. Dans le poème « Vieux frère », qui figure au sein du recueil Les Médaillons (1880), il décrit l’amitié complice qu’il entretient avec son chat, duquel il accepte l’amour éphémère et admire le scepticisme, qu’il élève au degré de vertu. Raillerie et paresse prennent des airs d’idéal à atteindre, incarnant la philosophie du bonheur propre au « vieux frère » à quatre pattes.

Dernière modification : 09/26/2025.

Sommaire de l'article

  1. Page 1 : Le chat dans la poésie
  2. Page 2 : « Épitaphe d’un chat », par Joachim du Bellay (1558)
  3. Page 3 : « Jubilate Agno », de Christopher Smart (1763)
  4. Page 4 : « Chats de partout », par Henry Monnier (1830)
  5. Page 5 : « Le chat noir de la palissade », par Henry Monnier
  6. Page 6 : « Le chat (1) », par Charles Baudelaire (1857)
  7. Page 7 : « Les chats », par Charles Baudelaire (1857)
  8. Page 8 : « Femme et chatte », par Paul Verlaine (1866)
  9. Page 9 : « À une chatte », par Charles Cros (1873)
  10. Page 10 : « Berceuse », par Charles Cros (1879)
  11. Page 11 : « Vieux frère », par Jules Lemaître (1880)
  12. Page 12 : « Le chat », par Maurice Rollinat (1883)
  13. Page 13 : « Elle aperçoit un Oiseau – piaule », de Emily Dickinson
  14. Page 14 : « Le petit chat », par Edmond Rostand (1890)
  15. Page 15 : « Le chat fatal », par Emile Nelligan (1899)
  16. Page 16 : « Les p’tits chats », par Gaston Couté
  17. Page 17 : « À la mémoire d’une chatte naine que j’avais », par Jules Laforgue (1901)
  18. Page 18 : « Le chat », par Guillaume Apollinaire (1911)
  19. Page 19 : « Chat », par Paul Eluard (1920)
  20. Page 20 : « Le chat et la Lune », de William Butler Yeats (1924)
  21. Page 21 : « Le chat qui ne ressemblait à rien », par Robert Desnos (1932)
  22. Page 22 : « Mon petit chat », par Maurice Carême (1947)
  23. Page 23 : « Le sommeil du chat », par Tristan Klingsor (1948)
  24. Page 24 : « Oda al Gato », par Pablo Neruda (1959)
  25. Page 25 : « Le chat et le soleil », par Maurice Carême (1972)
  26. Page 26 : « Devant la cheminée », par Pierre Menanteau (1972)
  27. Page 27 : « Poème du chat », par Jacques Roubaud (1983)
  28. Page 28 : « Goutte de lumière », par Marc Alyn (1986)
  29. Page 29 : « Un chat un chat », par François Gravel (2009)
  30. Page 30 : « Châtiment d’un chat renversé », par Sybille Rembard (2009)
  31. Page 31 : « Chat Fantôme », de Margaret Atwood (2020)