« Femme et chatte », par Paul Verlaine (1866)

Un portrait de Paul Verlaine

Texte du poème « Femme et chatte »

Elle jouait avec sa chatte,

Et c’était merveille de voir

La main blanche et la blanche patte

S’ébattre dans l’ombre du soir.

 

Elle cachait - la scélérate ! -

Sous ses mitaines de fil noir

Ses meurtriers ongles d’agate,

Coupants et clairs comme un rasoir.

 

L’autre aussi faisait la sucrée

Et rentrait sa griffe acérée,

Mais le diable n’y perdait rien...

 

Et, dans le boudoir où, sonore,

Tintait son rire aérien

Brillaient quatre points de phosphore.

Informations sur l'auteur et explications

Épris de sa cousine Élisa, le poète français Paul Marie Verlaine (1844-1896) ne supporte pas le mariage puis le décès en couche de celle-ci. Cette tragédie le pousse dans l’alcool et la violence, et fait naître en lui des sentiments contradictoires d’admiration et d’aversion face aux trop grandes beautés de ce monde.

 

Influencé par la fascination de son époque envers la puissante reine Cléopâtre et son charme aussi calculateur que ravageur, il consacre le chapitre « Caprices » de ses Poèmes saturniens (1866) aux relations amoureuses et surtout à la femme sous toutes ses formes. Dans « Femme et chatte », il démonise la gent féminine et dénonce sa perversion et sa férocité. On peut ressentir le dilemme qui se joue dans son esprit, perdu entre la dévotion et la haine. Les ongles d’agates dans les mitaines noires signifient richesse et pouvoir, atouts féminins dangereux, coupants tels des rasoirs.

 

Pour Verlaine, une femme ayant beauté, prospérité et autorité est forcément diabolique : ainsi excuse-t-il, au moyen de son œuvre, la frustration et la violence qu’il leur démontre physiquement à maintes occasions dans son quotidien. Même sa propre mère n’est pas épargnée…

Dernière modification : 09/26/2025.

Sommaire de l'article

  1. Page 1 : Le chat dans la poésie
  2. Page 2 : « Épitaphe d’un chat », par Joachim du Bellay (1558)
  3. Page 3 : « Jubilate Agno », de Christopher Smart (1763)
  4. Page 4 : « Chats de partout », par Henry Monnier (1830)
  5. Page 5 : « Le chat noir de la palissade », par Henry Monnier
  6. Page 6 : « Le chat (1) », par Charles Baudelaire (1857)
  7. Page 7 : « Les chats », par Charles Baudelaire (1857)
  8. Page 8 : « Femme et chatte », par Paul Verlaine (1866)
  9. Page 9 : « À une chatte », par Charles Cros (1873)
  10. Page 10 : « Berceuse », par Charles Cros (1879)
  11. Page 11 : « Vieux frère », par Jules Lemaître (1880)
  12. Page 12 : « Le chat », par Maurice Rollinat (1883)
  13. Page 13 : « Elle aperçoit un Oiseau – piaule », de Emily Dickinson
  14. Page 14 : « Le petit chat », par Edmond Rostand (1890)
  15. Page 15 : « Le chat fatal », par Emile Nelligan (1899)
  16. Page 16 : « Les p’tits chats », par Gaston Couté
  17. Page 17 : « À la mémoire d’une chatte naine que j’avais », par Jules Laforgue (1901)
  18. Page 18 : « Le chat », par Guillaume Apollinaire (1911)
  19. Page 19 : « Chat », par Paul Eluard (1920)
  20. Page 20 : « Le chat et la Lune », de William Butler Yeats (1924)
  21. Page 21 : « Le chat qui ne ressemblait à rien », par Robert Desnos (1932)
  22. Page 22 : « Mon petit chat », par Maurice Carême (1947)
  23. Page 23 : « Le sommeil du chat », par Tristan Klingsor (1948)
  24. Page 24 : « Oda al Gato », par Pablo Neruda (1959)
  25. Page 25 : « Le chat et le soleil », par Maurice Carême (1972)
  26. Page 26 : « Devant la cheminée », par Pierre Menanteau (1972)
  27. Page 27 : « Poème du chat », par Jacques Roubaud (1983)
  28. Page 28 : « Goutte de lumière », par Marc Alyn (1986)
  29. Page 29 : « Un chat un chat », par François Gravel (2009)
  30. Page 30 : « Châtiment d’un chat renversé », par Sybille Rembard (2009)
  31. Page 31 : « Chat Fantôme », de Margaret Atwood (2020)