Le chat dans le shintoïsme

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Le chat dans l’hindouisme
Un chat qui dort au sommet d'un torii au sanctuaire Fushimi Inari à Kyoto (Japon)

Pratiqué par plus de 90 millions de Japonais (soit plus de 80% de la population du pays), le shintoïsme est un ensemble de croyances polythéistes et animistes originaires de l’archipel, mais qui entretiennent des liens étroits avec le bouddhisme. Comme dans ce dernier, le chat n’est pas présent dans le panthéon des dieux, mais il occupe une place importante dans la spiritualité des habitants de l’archipel.

 

On trouve d’ailleurs dans la préfecture de Tokushima, à l’est de l’île de Shikoku, le sanctuaire Ōmatsu Daigongen, qui est dédié à un chat surnommé Nekogami-sama (« le dieu chat », en japonais). Les habitants peuvent ainsi venir prier devant l’un des 10.000 maneki neko présents, des figurines de chats censées porter chance. Selon la légende, le sanctuaire aurait été construit pour apaiser l’âme d’une femme injustement assassinée en même temps que son chat, l’un et l’autre étant ensuite revenus ensemble de l’au-delà pour se venger de leurs meurtriers. 

 

 

Illustration d'un Yokai ayant une apparence de chat et en train de souffler sur un feu
Un yokai avec une apparence de chat

Si l’idée d’un chat fantôme cherchant à venger la mort de sa maîtresse peut paraître curieuse, ce genre de personnage quelque peu sinistre est pourtant monnaie courante dans les légendes associées au shintoïsme, et le chat n’y joue pas toujours le beau rôle.

 

Il faut dire qu’il n’a pas toujours été l’un des animaux préférés des Japonais, contrairement à ce que l’on constate de nos jours. Après son arrivée tardive dans l’archipel en 538 ou 552 après J.-C, sa population connut une croissance rapide. On ne tarda guère à le retrouver partout dans les villes et les campagnes, où son comportement parfois surprenant donna lieu à toutes sortes d’interprétations surnaturelles. C’est ainsi qu’il commença à être associé à des yokais, des créatures folkloriques apparentées au shintoïsme, dotées de pouvoirs magiques et commettant toutes sortes de méfaits.

 

Illustration du Nekomata en train de jouer du shamisen
Le Nekomata

Parmi ceux-ci, on peut citer le Kasha, une créature mi-chat mi-démon capable de voler le corps des défunts, ou encore le Nekomata, mentionné pour la première fois par écrit en 1233 dans Meigetsuki, le journal intime du poète japonais Fujiwara no Teika (1162-1241). Il y est décrit comme une créature ayant « des yeux comme un chat, et un grand corps comme un chien » qui vit dans les montagnes et rôde la nuit pour tuer puis dévorer le corps de ses victimes. On pensait même le Nekometa capable de se changer en humain (généralement en vieille femme) pour tromper ses victimes, ainsi que de réveiller les morts en pratiquant la nécromancie.

 

Cette croyance n’était pas sans conséquence pour les chats : dans certaines régions rurales du pays, il était de coutume de couper la queue des chatons, car on pensait que cela les empêchait de se changer en l’un de ces monstres.

 

Représentation d'un Bakeneko tourmentant des humains
Le Bakeneko

Le yokai félin le plus connu reste toutefois le Bakeneko, un esprit prenant la forme d’un chat ordinaire (généralement, un Bobtail Japonais) et capable de se déplacer sur ses pattes arrière ainsi que de projeter des boules de feu. Lui aussi maléfique, ce yokai chercherait à dévorer la personne qui l’a adopté pour ensuite prendre sa place et son apparence. 

 

De nos jours, ces superstitions ne sont évidemment plus aussi prévalentes que par le passé. Au contraire, le chat tend désormais à être perçu comme un symbole de chance ; en atteste en particulier la popularité du maneki neko. Apparue au pays du soleil levant à la fin de l’ère Edo (1603-1868), cette statuette, généralement en porcelaine ou en céramique, représente un chat blanc assis levant la patte et aurait la capacité d’attirer les clients et les ventes, c’est-à-dire de permettre à son propriétaire de s’enrichir. Le maneki neko n’est certes pas directement rattaché au shintoïsme, mais constitue un témoignage de l’évolution des superstitions à l’égard des petits félins.

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Dernière modification : 02/05/2025.