Les chats ont beau être globalement robustes et avoir une espérance de vie longue pour des animaux de leur gabarit, ils sont tout de même sujets à toutes sortes de maladies plus ou moins graves. C'est le cas notamment de la toxoplasmose, qui est le plus souvent sans gravité mais peut aussi s'avérer sévère - voire mortelle.
Cette maladie parasitaire n'est pas seulement dangereuse pour les petits félins : elle l'est aussi pour beaucoup d'autres espèces, notamment les humains. C'est d'ailleurs l'une des principales maladies qu'un chat peut transmettre à une femme enceinte, avec notamment à la clef un risque de malformation du bébé - voire de fausse couche.
En quoi consiste exactement la toxoplasmose, et comment se transmet-elle ? Peut-on l'attraper simplement en caressant un chat, ou en se faisant mordre ou griffer ? Quels sont les symptômes possibles lorsqu'un chat en est atteint ? Existe-t-il alors un traitement efficace pour le soigner ? Peut-on protéger son petit félin contre cette maladie ?
La toxoplasmose est une maladie infectieuse causée par un minuscule parasite : le toxoplasme, de nom scientifique Toxoplasma gondii.
Celui-ci peut infecter beaucoup d'animaux à sang chaud, parmi lesquels l'être humain. D'ailleurs, il s'agit d'une zoonose, c'est-à-dire d'une maladie qui se transmet des animaux aux humains. Ce sont toutefois les félins - et plus particulièrement les chats - qu'il colonise, et ce sont les seuls chez qui il est en capacité de se reproduire. D'ailleurs, une étude intitulée « A unique Toxoplasma gondii haplotype accompanied the global expansion of cats » et publiée en 2022 dans la revue Nature Communications a montré que l'évolution et la diffusion du parasite à travers le monde ont été intimement liées à celles des chats domestiques.
Quelle que soit l'espèce, la toxoplasmose ne provoque généralement qu'un état grippal passager et sans gravité, voire aucun symptôme du tout. Toutefois, elle est souvent nettement plus sévère chez les individus fragiles, notamment les jeunes (y compris les foetus et embryons pendant une grossesse), les seniors ou encore ceux souffrant d'un système immunitaire défaillant. Dans les cas graves, elle peut même être mortelle, du moins en l'absence de traitement.
La parasite à l'origine de la toxoplasmose (Toxoplasma gondii) pénètre dans l'organisme par ingestion - donc par le biais du tube digestif. Il se répand ensuite dans tout le corps et se met à attaquer les cellules.
Chez un chat adulte et en bonne santé, cette attaque déclenche aussitôt une production massive d'anticorps, destinés à éradiquer le parasite le plus tôt possible. Celui-ci s'en protège en formant des kystes sur divers tissus ou organes, dans lesquels il se réfugie : une fois à l'intérieur, il ne peut plus nuire, mais les anticorps ne peuvent l'atteindre.
En général, ces kystes restent en place pendant des années - voire à vie - et protègent ainsi le parasite, qui reste inactif mais bien vivant à l'intérieur du corps de l'hôte. Ils peuvent toutefois finir par se désagréger avec le temps, et donc le libérer : il redevient alors dangereux, mais vulnérable. Les anticorps créés lors de la contamination initiale étant efficaces à vie, ils se chargent alors de l'éliminer avant qu'il n'ait le temps de causer beaucoup de dégâts. C'est ce qui explique que la toxoplasmose s'avère légère - voire asymptomatique - dans une large majorité de cas.
Les anticorps remplissent également leur rôle en cas de nouvelle contamination, c'est-à-dire en cas d'ingestion de nouveaux parasites. C'est pourquoi cette maladie est considérée comme immunisante : un individu l'ayant déjà contractée ne peut normalement plus être touché tout le reste de sa vie, car ses anticorps le protègent contre toute nouvelle infestation ultérieure.
Toutefois, cela n'est vrai que si le chat dispose d'un système immunitaire efficace. Dans le cas contraire, en particulier s'il est très jeune, très vieux ou immunodéficient (par exemple s'il est touché par la leucose ou le FIV, le sida du chat), les anticorps ne sont pas assez nombreux pour contenir le parasite. Ce dernier est donc en mesure d'attaquer l'organisme : soit lors de la première contamination si l'animal est déficient dès le départ, soit lors de la désagrégation d'un kyste s'il l'est devenu entretemps. La toxoplasmose est alors bien plus sévère, et peut même s'avérer mortelle dans les cas graves.
Quelle que soit l'espèce, la toxoplasmose peut se transmettre de trois façons :
Le parasite à l'origine de cette maladie ne peut produire des oeufs que depuis le corps d'un félin, et pas depuis celui d'un autre animal. De plus, il ne peut le faire que pendant les trois semaines qui suivent son arrivée dans l'organisme. Les oeufs alors produits sont excrétés dans les déjections du félin, et se retrouvent donc dans la nature. Ils ne deviennent contaminants qu'au bout de quelques jours, mais une fois qu'ils le sont, ils peuvent le rester pendant de longs mois - tout dépend des conditions extérieures. Un chat qui ingère ces déjections, ou bien qui mange des éléments (terre, herbe, fruits, légumes, etc.) ou boit de l'eau ayant été en contact avec elles, est alors susceptible d'être contaminé à son tour.
Par contre, le parasite peut créer des kystes dans les tissus de n'importe quel animal qu'il parvient à infester : un chat bien sûr, mais aussi un rongeur, un oiseau, une vache, un mouton, un porc, du gibier... Le cas échéant, l'ingestion de viande issue de l'animal en question peut être source de contamination. Le seul moyen de l'éviter est de cuire la viande à coeur, ou de la congeler à -20°C pendant plusieurs jours d'affilée. Le risque à ce niveau concerne donc surtout un chat qui a l'occasion de chasser, ou qui est nourri avec de la viande n'ayant pas été bien congelée et servie crue ou mal cuite.
Enfin, le parasite à l'origine de la toxoplasmose est capable de traverser la barrière placentaire, et donc de passer d'une mère infectée à ses foetus pendant la gestation. Cela ne vaut toutefois que si c'est la première fois qu'elle le contracte : dans le cas contraire, son organisme possède déjà les anticorps l'éliminent avant qu'il n'ait le temps d'atteindre les petits.
En dehors du cas particulier de la gestation, la transmission de la toxoplasmose se fait rarement d'un chat à l'autre. En effet, elle n'est possible ni par léchage, ni par griffure, ni par morsure, ni même par accouplement.
En fait, elle ne survient que lorsqu'un chat ingère des éléments contaminés par les déjections d'un congénère malade : de la terre, de l'herbe, des fruits... Comme les félins ont pour habitude d'enterrer leurs besoins, ce risque est finalement faible.
Le cas de transmission le plus fréquent est celui de chats partageant la même litière. En particulier, si l'un d'entre eux fait sa toilette après avoir touché du sable ou des gravillons souillés par un congénère porteur du parasite, il est susceptible d'avaler des oeufs et donc de s'infecter de cette manière. Le risque n'existe toutefois que si la litière n'est pas suffisamment changée, car les oeufs mettent plusieurs jours pour devenir contaminants et donc dangereux. Si l'on prend soin de jeter les crottes chaque jour, le risque de transmission d'un chat à l'autre est très faible.
La toxoplasmose est une zoonose féline, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une maladie qui peut se transmettre du chat à l'Homme.
La contamination se fait par le biais d'éléments ayant été souillés par des déjections d'un petit félin malade : la litière, de la terre... Si on les manipule à mains nues puis qu'on ne se lave pas convenablement les mains, on est susceptible d'ingérer des oeufs et de contracter la maladie. Le risque est surtout élevé pour les très jeunes enfants, car ils ne sont pas regardants sur ce qu'ils portent à leur bouche.
Cela étant, il n'est pas utile de paniquer si l'on a un chat chez soi : la transmission ne peut se faire que si les déjections ont déjà quelques jours. Ainsi, dès lors que les mesures d'hygiène de base sont respectées (porter des gants quand on nettoie la litière et se laver les mains ensuite, ne pas laisser s'accumuler les crottes...), le risque est très faible, même si l'on a un petit félin malade. C'est ce qui explique que dans la pratique, on a bien plus de chances de contracter la toxoplasmose en ingérant des aliments crus ou mal cuits (notamment de la viande) que par le biais de son animal.
Un chat qui contracte pour la première fois le parasite à l'origine de la toxoplasmose ne possède pas encore les anticorps lui permettant de se défendre.
De ce fait, il est susceptible de développer une forme plus ou moins sévère de la maladie, en fonction de l'état de son système immunitaire :
Par contre, s'il l'a déjà contracté par le passé, il possède les défenses suffisantes pour éliminer le parasite presque immédiatement : il reste alors asymptomatique.
En effet, la toxoplasmose est une maladie immunisante : un individu ne peut l'attraper qu'une seule fois dans sa vie. Ceci s'explique par le fait que lors d'une infestation, il développe des anticorps qui demeurent à vie dans son organisme et lui permettent de se défendre efficacement s'il est à nouveau contaminé par le parasite. C'est le même principe que pour la varicelle chez l'humain, par exemple.
S'il est en bonne santé lorsqu'il contracte le parasite pour la première fois, le chat ne présente que très peu de symptômes - voire aucun symptôme du tout. En effet, son système immunitaire élimine l'intrus avant que celui-ci n'ait eu le temps de causer beaucoup de dégâts dans l'organisme.
Les principaux signes cliniques que l'on est susceptible d'observer sont de la fièvre, de la fatigue, des ganglions gonflés et/ou de la diarrhée - c'est-à-dire globalement les mêmes que pour n'importe quelle infection. Ces symptômes sont passagers : ils ne durent généralement que quelques jours, puis disparaissent spontanément. D'ailleurs, ils passent souvent inaperçus.
Cela ne signifie pas qu'ensuite le chat n'est plus porteur du parasite, car il peut en fait le rester pendant des années - voire à vie. Néanmoins, ce dernier est alors inoffensif : réfugié dans des kystes, il ne peut plus attaquer l'organisme, ni même se reproduire. Il peut tout de même redevenir dangereux si le petit félin développe par la suite une immunodépression, c'est-à-dire une baisse drastique de ses défenses immunitaires. Ce cas est toutefois rare : on considère donc généralement qu'une fois qu'il a contracté la toxoplasmose, il en est à l'abri pour le restant de ses jours.
Si le chat est fragile lorsqu'il contracte le parasite pour la première fois (en particulier s'il s'agit d'un chaton, d'un senior ou d'un individu immunodéprimé), il existe un risque que son système immunitaire ne soit pas en mesure de l'éliminer rapidement. Dans ce cas, le toxoplasme est susceptible de se multiplier abondamment dans son organisme, et de causer des dégâts au niveau des tissus qu'il parvient à coloniser.
Les symptômes dépendent des organes touchés, et sont par conséquent très variables d'un chat à l'autre. Il peut s'agir par exemple de troubles respiratoires (toux, difficulté à respirer...), oculaires (notamment une inflammation ou une baisse de la vision), digestifs (diarrhée, vomissements...), hépatiques (jaunisse) et/ou neurologiques (perte d'équilibre, convulsions, etc.).
Si l'atteinte reste limitée, le chat peut éventuellement guérir de la toxoplasmose, généralement après plusieurs semaines. Dans le cas contraire, et en particulier en cas d'atteintes respiratoires ou hépatiques, le pronostic a des chances d'être mauvais. Toutefois, une très faible minorité des chats infectés se retrouvent dans cette situation.
De manière générale, il n'est pas évident de détecter qu'un chat est atteint par la toxoplasmose. En effet, l'infestation reste la plupart du temps peu symptomatique, voire totalement asymptomatique ; même lorsque ce n'est pas le cas, les signes cliniques sont très variables et peu spécifiques.
Le vétérinaire est davantage susceptible de soupçonner la maladie si l'animal est globalement fragile : un chaton, un chat très vieux, un individu souffrant d'une pathologie lourde... En effet, les symptômes sont alors généralement plus prononcés.
Pour compléter son diagnostic, il peut observer ses déjections au microscope, pour y chercher des traces d'oeufs. Cela étant, ce test ne suffit pas à lui seul, car il est difficile de les distinguer des oeufs d'autres parasites.
Les examens les plus fiables à ce jour sont un test PCR et/ou une sérologie, pour rechercher des traces du parasite ou des anticorps. Ces tests sont toutefois onéreux (jusqu'à 100 euros chacun), et il faut souvent plusieurs jours pour obtenir les résultats. Or, si le chat est très malade, il est rarement possible d'attendre aussi longtemps pour entamer un traitement. Dans un tel cas de figure, le vétérinaire met donc généralement en place le traitement contre la toxoplasmose avant même d'avoir obtenu les résultats de l'examen, quitte à corriger le tir ensuite si le test se révèle finalement négatif.
Dans la plupart des cas, un chat atteint de toxoplasmose n'a besoin d'aucun traitement, car il ne présente que peu - voire pas - de symptômes et guérit spontanément.
De fait, un traitement n'est nécessaire que si l'animal possède un système immunitaire trop faible pour se défendre lui-même, ce qui se traduit par l'atteinte de divers tissus et/ou organes. Il faut alors l'aider à se débarrasser du parasite avant que celui-ci n'ait le temps de causer des dommages potentiellement irréversibles.
En général, le traitement consiste en un antibiotique spécifique appelé clindamycine, avec éventuellement des corticostéroïdes en cas d'inflammation oculaire et/ou cérébrale. Il est d'autant plus efficace qu'il est mis en place tôt : le cas échéant, les symptômes commencent généralement à diminuer au bout de quelques jours seulement. Il convient toutefois de le prolonger jusqu'à la disparition complète des signes cliniques (ce qui peut prendre plusieurs semaines), et même un peu plus : cela permet de s'assurer que le parasite est bien éradiqué totalement.
Toutefois, si le traitement est mis en place tardivement et/ou si des symptômes hépatiques et/ou respiratoires sont déjà présents, le pronostic est globalement sombre, et la guérison est peu probable. Il en va de même si le petit félin est atteint d'une maladie lourde et incurable comme le sida du chat (FIV) ou la leucose : son décès est de toute façon inévitable à plus ou moins court terme du fait de cette dernière, mais la médication peut augmenter un peu son espérance de vie.
Quoi qu'il en soit, le prix du traitement contre la toxoplasmose se situe généralement entre 50 et 100 euros. Ce montant est normalement pris en charge au moins en partie par l'assurance, si l'on a pris soin d'assurer la santé de son chat avant l'apparition des premiers symptômes.
Dans la mesure où il n'existe à ce jour aucun vaccin contre la toxoplasmose, ni même aucun autre traitement utilisable de manière préventive, le mieux pour protéger son chat est de tout faire pour qu'il n'ingère pas le parasite.
Cela suppose en particulier :
Dans le cas d'un chat particulièrement vulnérable (notamment s'il est très jeune, très âgé et/ou atteint d'une maladie lourde), la question peut se poser de ne pas lui laisser un libre accès à l'extérieur du domicile, car il pourrait contracter le parasite en ingérant une proie elle-même contaminée. Toutefois, le fait de le garder uniquement en intérieur peut s'avérer délétère pour sa santé psychologique, a fortiori si jusqu'alors il était habitué à sortir comme bon lui semble. Le mieux est d'en discuter avec son vétérinaire habituel, pour savoir comment agir au mieux.
Si un chat a déjà contracté le parasite à l'origine de la toxoplamose, il est normalement immunisé contre cette dernière - même s'il n'a pas été malade. En effet, son organisme a développé des anticorps le protégeant à vie contre une nouvelle infestation.
Faire faire une prise de sang à son chat (c'est-à-dire une sérologie) permet de savoir ce qu'il en est. Si celle-ci met en évidence la présence d'une grande quantité d'anticorps contre le toxoplasme, c'est le signe que l'animal a été infecté par le passé et a développé une immunité contre la maladie. Dans le cas contraire, il n'est pas protégé et peut donc tomber malade s'il contracte le parasite à l'avenir.
Ce test est surtout intéressant si le foyer comporte une ou des personne(s) vulnérable(s) : un enfant très jeune, une femme enceinte, un senior, un individu immunodéprimé... En effet, un chat ne présente aucun danger pour son entourage dès lors qu'il est immunisé, mais dans le cas contraire il peut être contagieux - et donc dangereux - s'il contracte le parasite. Le cas échéant, une vigilance particulière est nécessaire pour éviter de tomber malade : en particulier, il convient de ne pas manipuler ses excréments à mains nues, et de retirer ceux présents dans sa litière le jour même.
La toxoplasmose est une zoonose contagieuse et répandue, qu'un chat attrape le plus souvent en ingérant des aliments crus ou mal cuits, ou des éléments ayant été en contact avec des crottes d'un congénère infecté. Elle reste la plupart du temps peu grave voire asymptomatique, mais peut devenir réellement dangereuse chez les petits félins les plus fragiles. Le cas échéant, un traitement est nécessaire pour maximiser les chances de guérison.
Il en va d'ailleurs globalement de même pour un humain, qui peut contracter la maladie mais guérit le plus souvent sans difficulté - en tout cas s'il est en bonne santé. Prendre de bonnes habitudes (comme se laver systématiquement les mains après avoir manipulé la litière) reste tout de même important pour la prévenir, a fortiori si l'on est faible et/ou fragile. Cela permet d'ailleurs aussi d'éviter un certain nombre d'autres zoonoses du chat, comme la toxocarose ou la leptospirose, qui pour le coup sont susceptibles d'être bien plus graves. Autant donc se montrer rigoureux sur les questions d'hygiène.