CANADA - Plus de chats que d'enfants dans les foyers québécois

12/11/2006

Québec

Il y a dans les chaumières du Québec plus de chats que d'enfants. Pas étonnant alors que les animaux domestiques prennent autant de place dans le coeur de leurs maîtres, qui pigent dans leur portefeuille pour leur offrir, à l'occasion, des luxes autrefois réservés aux humains. Films, parfums, vêtements, massages... Qui se plaindrait encore d'avoir une vie de chien?

Rien de trop beau pour toutou

Vous aimez le cinéma? Votre chien aussi, apparemment. Courez chercher Dogllywood, le premier film pour pitous offert en DVD et dans Internet. Et, comme chez les humains, le succès amène aussi une suite. Bientôt à l'affiche dans une niche près de chez vous : Dogllywood 2!

Entrer dans l'univers de l'industrie des animaux de compagnie, c'est aller à la rencontre de propriétaires et d'entreprises maniaques de ces bêtes traitées de plus en plus comme des enfants. L'anthropomorphisme règne en maître et aucun plaisir humain ne doit leur être refusé.Que dire de la musique d'ambiance pour contrer la solitude de Minou ou Pitou, enregistrées en ondes alpha de 8 à 13Hz, réputées pour réduire l'anxiété de nos compagnons à quatre pattes?

De plus en plus de municipalités, dont Rimouski et Laval, se sont munies de masques à oxygène pour chiens et chats afin de leur assurer les premiers soins en cas d'incendie. L'idée d'origine américaine, reprise ici par le projet RanimO2, pourrait peut-être s'implanter à Québec, alors qu'un groupe serait prêt à faire don de masques aux pompiers de la capitale. À suivre...

À cela s'ajoutent les parfums pour animaux, les services de photographes professionnels, les niches qui se prennent pour des lofts et quoi encore?

Les États-Unis, leaders

Si ces produits peuvent paraître farfelus, ils ne sont que les plus récents exemples de la place qu'occupent les animaux domestiques dans nos vies, et, surtout, le signe d'une industrie qui roule à plein régime. Aux États-Unis, leaders dans le domaine, les dépenses consacrées aux animaux de compagnie s'élèvent en 2006 à 40 milliards, 30 % de plus qu'en 2000.

En comparaison, nos voisins du Sud consacrent 48 milliards aux jeux pour enfants. À peine plus. Au Québec, selon Compusearch, l'industrie des animaux de compagnie assure 592 millions par an de retombées économiques.

Selon les dépenses des Canadiens compilées par Statistique Canada, les propriétaires d'animaux au pays y consacrent en moyenne 697$ par année. Ce chiffre atteint 807$ en Ontario et 750$ en Colombie-Britannique. Le Québec, toutefois, arrive parmi les derniers avec 516$.

«Le Québec est l'un des endroits où les gens dépensent le moins pour leurs animaux et où il y a le moins d'animaux en Amérique du Nord», note le vétérinaire Michel Pepin, directeur de l'Académie de médecine vétérinaire du Québec et chroniqueur à l'émission Salut Bonjour. Mais des préjugés persistent. «Dépenser pour une bonne bouteille de vin est bien vu, mais pour un chien, ça reste mal vu», illustre le Dr Pepin.

Le chat chasse le chien

Les chats ont la cote. Leur popularité supplante de loin celle des chiens et la tendance est irréversible.

«Un jour, on aura deux fois plus de chats que de chiens au Québec», prédit le Dr Pepin.

L'Académie de médecine vétérinaire du Québec a commandé un vaste sondage à la firme Léger Marketing. Résultat : la province compte 1 325 000 chats et 840 000 chiens. En 2006, 27% des foyers avaient un chat, une hausse de près de 4% depuis 1995. En comparaison, le chien est en chute avec 21% des foyers comparativement à 24,2% en 1995.

Plus facile, le chat

Dans la dernière décennie, l'écart n'a cessé de se creuser en faveur de la gent féline. «C'est à l'image de notre société, note le Dr Pepin. Les gens veulent un animal, mais ils ont moins de temps pour s'en occuper.» Ils optent donc pour le chat, «plus facile et plus autonome».

Le vieillissement de la population y est aussi pour quelque chose. Les baby-boomers qui arrivent à leur retraite privilégient les chats. «Ils se disent que leurs enfants sont élevés, ils veulent voyager, ne pas se sentir pris.» L'urbanisation expliquerait aussi ces données. «Les gens habitent dans des villes où les chiens sont de moins en moins tolérés. Avoir un chien est plus contraignant qu'un chat.»

Selon le Dr Pepin, la tendance pro-chat n'est pas près de s'estomper.

«On peut imaginer que la baisse de popularité du chien se poursuivra durant tout le prochain siècle.»

Photo : Les québecois logent 1 325 000 chats et 840 000 chiens.
Photo archives, La Presse