En France , dans le cadre d'un divorce, la loi prévoit des mesures adéquates concernant la répartition des biens et la garde des enfants.
Mais que dit-elle sur la garde des animaux de compagnie du foyer ?
Le Code civil étant muet sur le sujet, certains litiges sont difficiles à traiter, même si le juge s'appuie parfois sur la jurisprudence relative aux enfants pour l'appliquer aux animaux. Toutefois, dans certains cas, il sera nécessaire d'établir un accord à l'amiable.
Quoi qu'il en soit, une séparation a un impact émotionnel non négligeable, non seulement chez les membres de la famille, mais aussi chez l'animal. Ainsi, le juge, mais aussi les parties, doivent tenir compte du bien-être du chat et, le cas échéant, de celui des enfants, qui y sont souvent très attachés.
En 2017, en France, plus de 68.000 cas de divorce ont été enregistrés. La question de la garde des animaux lors de telles situations se pose de plus en plus. En effet, un foyer sur deux possède un animal domestique. Ainsi, en 2018, la France compte approximativement 67 millions d'habitants (répartis en 28 millions de foyers) pour quelque 68 millions d'animaux domestiques, dont environ 12 millions de chats et 8 millions de chiens.
Dans son livre Le Droit des animaux de compagnie, la juriste Valérie Svec explique que les tribunaux français, dans le cadre de procédures de divorce, sont de plus en plus confrontés à des litiges relatifs à la garde de l'animal. Ce phénomène s'observe aussi outre-Atlantique et outre-Manche. Une étude menée au Royaume-Uni en 2005 auprès d'un millier de propriétaires d'animaux de compagnie montre d'ailleurs que 39% d'entre eux sont prêts à se lancer dans une bataille judiciaire en vue d'obtenir la garde de leur animal. Aux États-Unis, il existe même des avocats spécialisés dans ce domaine, avec comme slogan "You get the car, I get the cat" ("Tu as la voiture, je garde le chat").
L’attachement des maîtres envers leur compagnon est parfois tel que l'obtention de la garde de ce dernier devient un enjeu important lors de la séparation. Dans certains cas extrêmes, des maîtres irréconciliables sont même allés jusqu'à prendre la décision d'euthanasier l'animal !
En cas de divorce par consentement mutuel, les époux se mettent d’accord pour mentionner la partie qui obtiendra la garde de l'animal. Parfois, un droit de visite pour l’autre époux, voire parfois la possibilité d'héberger temporairement l'animal, peuvent être prévus.
Au contraire, lorsque les époux ne parviennent pas à trouver un accord à l’amiable, le juge devra choisir le conjoint qui remplit le mieux les conditions de détention appropriées prévues par la loi. Pour cela, il se fondera sur la capacité à fournir à l'animal une alimentation correcte, des soins adéquats, et du temps pour s'en occuper (promenade, jeux...), qui sont autant d'aspects nécessaires à son bien-être. Le droit de pouvoir conserver l'animal provisoirement pendant la procédure de divorce peut ainsi se transformer ou non en droit de garde définitif à l'issue du jugement.
A l'inverse, il existe des cas où aucun des conjoints ne souhaite ou ne peut garder l'animal. Dans un tel cas de figure, il n'y a pas beaucoup d'autre solution que d'en confier la garde à un membre de l'entourage, ou à défaut le remettre à un refuge.
Le statut juridique des animaux est consacré par l'article 528 du Code civil français, qui dispose que "sont meubles par leur nature les animaux et les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent par eux-mêmes, soit qu'ils ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère".
En 2015, l'entrée en vigueur de la loi relative à la modernisation et à la simplification du droit a eu pour conséquence la création d'un nouvel article 515-14 rédigé en ces termes : "Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime du droit des biens".
Malgré cette évolution, d'un point de vue juridique, l'animal de compagnie possède un statut quasiment équivalent à celui d'une télévision ou encore d'un véhicule. En cas de divorce, le sort de l'animal, qui n'a pas de personnalité juridique, s'inscrit donc dans le même cadre que celui du partage des biens communs des époux.
C'est ce que rappelle la Cour d'appel de Paris dans un arrêt du 5 juin 1991, en indiquant que "les animaux étant des meubles par nature, il appartient à l'époux qui, après divorce, demande l'attribution d'un chien, de faire la preuve de ses droits privatifs comme sur un meuble ordinaire".
Lorsque le mariage est soumis au régime de la séparation des biens, sa garde, ou plus exactement son attribution en pleine propriété, reviendra à l'époux qui apportera la preuve de sa propriété exclusive en présentant le certificat de vente du chien ou tout autre document officiel attestant de la propriété de l'animal.
Dans le cadre du régime de la communauté réduite aux acquêts, l'animal appartient au conjoint qui en avait la possession avant le mariage. Si le chien ou le chat a été acquis après le mariage, il devient un bien commun. Par conséquent, celui qui le conserve doit dédommager son ex-conjoint.
En cas de refus du paiement de la prestation compensatoire, le propriétaire de l'animal est protégé la saisie de son chien ou de son chat. En effet, l'article R112-2 du Code des procédures civiles d'exécution les considère comme des biens insaisissables.
Cependant, lorsque l'animal a été adopté par les deux conjoints ou si l'un deux n'est pas en mesure d'apporter la preuve qu'il en est le propriétaire, il sera alors considéré comme un bien indivis, c'est-à-dire appartenant aux deux. En cas de désaccord entre les deux parties, le juge d’instance, chargé d'organiser le partage des biens, doit alors choisir à qui revient la garde de l’animal.
Dans tous les cas, quand bien même un des ex-époux est clairement identifiable comme étant le propriétaire de l'animal, rien ne lui interdit de le céder à son ex-conjoint pour une quelconque raison.
Dans le cadre de l'acquisition ou de l'adoption de l'animal par des époux mariés sous le régime de la communauté universelle, aucun d'entre eux ne peut prétendre à la propriété exclusive de l'animal. Il existe alors deux cas possibles : soit les époux arrivent à se mettre d'accord, soit ils ne parviennent pas à négocier à l'amiable le sort de l'animal.
Dans le cadre d'un désaccord, il appartient au juge d'exercer son pouvoir discrétionnaire afin de rendre une décision. Toutefois, contrairement au cas de la garde alternée de l'enfant, le juge des affaires familiales outrepasse alors ses compétences, dans la mesure où il n'existe pas de texte de loi abordant le cas des animaux domestiques en cas de séparation. Par conséquent, le conjoint réclamant la propriété de l'animal peut se voir opposer une fin de non-recevoir, pour défaut du droit d'agir sans examen au fond (en théorie, le juge n’a pas à se prononcer).
En l'absence de contrat écrit concernant l'acquisition de l'animal, les conjoints peuvent choisir ensemble une personne faisant autorité en matière de connaissances canines ou félines à laquelle ils accepteront de soumettre leur différend, pour ensuite se ranger à son avis : juge de la société centrale canine/féline, président ou membre du bureau d'un club canin ou félin régional ou du club de race, etc. Ce conciliateur peut aussi être nommé directement par la Cour d'appel sur la demande d'un des maîtres de l'animal. Le rôle du conciliateur et ses conclusions pourront, le cas échéant, avoir la force d'une décision de justice.
Si, en principe, le juge n'a pas pour mission de régler la question de la garde du chien ou du chat, il en va autrement dans la réalité. Le cas échéant, ses décisions reprennent la logique de la législation applicable aux enfants.
En France, Maître Franck Méjean a été précurseur en la matière. Cet avocat a été le premier à avoir plaidé et obtenu la résidence alternée pour enfants, puis est par la suite parvenu à faire transposer ce principe pour un chat. Sa garde fut donc alternée : une semaine chez monsieur puis une semaine chez madame.
Voici trois exemples de décisions judiciaires illustrant ce phénomène :
Toutefois, si les textes applicables aux enfants ont pu aider la justice à trancher le sort de l'animal, il faut se garder de tout anthropomorphisme : un animal n’est pas un enfant. Cette idée est d'ailleurs partagée par la justice allemande, qui a considéré, dans une décision de décembre 2011 ayant fait jurisprudence outre-Rhin, que le droit de visite en cas de divorce ne s'applique pas aux chiens.
Outre-Atlantique, certains juges ont pris délibérément le parti de laisser l'animal choisir de lui-même. Ils procèdent alors à des "mises en situation". L'animal installé à équidistance de ses deux maîtres est appelé par l'un et l'autre. Le juge accordera la garde à celui des deux époux qui a su faire venir l'animal à lui.
Dans tous les cas, s'il est amené à trancher, le juge tâchera d'analyser rigoureusement la situation afin d'estimer non seulement les sentiments d'affection pour l'animal, mais également le bien-être de celui-ci, en ce qui concerne l'alimentation, les soins, le temps disponible pour les promenades, etc.
Dans le cas où les conjoints ont des enfants, le juge souhaitant statuer sur le devenir de l'animal est obligé de veiller à la fois à l'intérêt des enfants de la famille, qui pourraient souffrir de la séparation avec leur animal de compagnie, et à celui de l'animal, lui-même susceptible de subir des maltraitances.
Avant de considérer le ressenti du maître ou de la maîtresse, c'est la meilleure option pour l’animal et les enfants concernés qui doit être choisie.
Le couple peut aussi opter, d’un commun accord, pour une garde alternée. Ce système permet notamment de préserver la relation entre les enfants et l’animal.
Normalement, le chien est capable de s'adapter aux conséquences de la séparation : changement de lieu de vie, garde alternée...
Cependant, dès les premiers jours, des signes éventuels de mal-être, voire des troubles du comportement, variables en fonction du tempérament et du caractère du maître, mais aussi de l'animal, peuvent se manifester. En effet, un divorce peut être perçu comme une dislocation de la meute, un démembrement plus ou moins bien vécu. Or, le chien est un animal social qui tisse des liens très forts. Dans la nature, c'est de la coopération entre les membres de la meute que dépend la quête de la nourriture, mais aussi la survie en général.
En outre, la séparation familiale est susceptible d'engendrer un véritable choc émotionnel chez l'animal. En effet, le chien, qui est un être sensible, va réagir aux changements émotionnels du maître, qui doit faire face à la solitude, ainsi qu'à de possibles changements de comportement de ce dernier.
Par ailleurs, cet événement peut entraîner une perte importante de ses repères, car selon le foyer auquel il aura été confié, il ne va peut-être plus sortir ou se nourrir à la même heure. En effet, le chien domestique tend à suivre une routine journalière concernant l'exploration du territoire, le repos, le réveil, etc. Par conséquent, l'animal peut développer certains problèmes : manque d'hygiène, destructions, vol de nourriture, ou encore refus de nourriture...
Le maître qui obtiendra la garde du chien aura donc la responsabilité de lui donner de nouveaux repères en étant plus présent à ses côtés, par exemple pour jouer avec lui ou l'emmener en promenade. Il faut en effet savoir que le divorce peut conduire à la dépression du chien.
Quant au chat, qui est un animal territorial, il pourrait avoir davantage de difficultés à s’adapter à un éventuel déménagement, voire, encore pire, à la mise en place d'une garde alternée. Un divorce peut donc rapidement être à l'origine d'une dépression du chat.
Si une procédure de divorce constitue une période éprouvante pour les maîtres, il en va de même pour leurs chats.
Par conséquent, la solution est entre les mains du maître qui doit tout d’abord se ressaisir psychologiquement et avoir un comportement plus équilibré (le chat est une thérapie pour le maître également).
Que le devenir de l'animal soit tranché par les maîtres ou par le juge, la décision doit être fondée sur le bien-être de l'animal, en plus de celui des autres membres de la famille.
En pratique, le conjoint en charge de l'animal devra s'en occuper en respectant des horaires réguliers, lui accorder de longues promenades, des temps de jeu, maintenir son éducation et le sociabiliser, afin d'éviter qu'il ne développe des troubles comportementaux.
Association pour la défense et la protection des animaux en France.
Bonjour à toutes et à tous, Après 5 ans de vie commune, mon conjoint et moi nous sommes séparés il y a...