Comme beaucoup d’autres espèces, le chat n’est pas épargné par toutes sortes de maladies touchant son appareil génital. Une bonne partie d’entre elles sont peu graves et se soignent facilement, mais certaines sont beaucoup plus problématiques - d’autant qu’on ne les détecte pas forcément tout de suite. C’est le cas notamment du pyomètre, un problème de l’utérus peu connu et pourtant souvent grave.
Quelles en sont les causes possibles, et comment se manifeste-t-il ? Quels traitements peut-on mettre en place ? Existe-t-il un moyen de le prévenir ?
Le pyomètre désigne une accumulation importante de pus à l'intérieur de l'utérus d’un animal femelle telle qu’une chienne, une chatte, etc. Le terme vient des mots grecs « pyo » et « metra », qui signifient respectivement « pus » et « utérus ».
Il ne s’agit pas d’une maladie, mais du principal symptôme d’une infection utérine : la métrite. Les deux termes sont d’ailleurs souvent utilisés comme synonymes dans le langage courant, alors qu’ils ne désignent pas exactement la même chose : le pyomètre est en fait la conséquence de la métrite, et non un synonyme de cette dernière.
Quoi qu’il en soit, il ne concerne que les chattes entières : les mâles et les femelles stérilisées ne peuvent être touchés.
Ce problème de santé est loin d'être bénin : le pronostic vital de l’animal concerné peut être engagé, particulièrement en cas de prise en charge tardive. Or, les symptômes ne sont pas toujours évidents à détecter, si bien qu'il n'est pas forcément aisé d’agir rapidement.
Chez le chat comme chez les autres espèces concernées, le pyomètre peut être de deux types différents : à col ouvert ou à col fermé.
En effet, au cours du cycle menstruel, le col de l’utérus d’une chatte est tantôt ouvert, tantôt fermé. Ainsi, en fonction du moment où le pyomètre survient, les symptômes et la gravité peuvent différer.
C’est le second type (le pyomètre à col fermé) qui est le plus problématique, car le pus présent dans l’utérus n’a alors aucun moyen d’être expulsé et s’accumule dans l’organisme, ce qui aggrave l’infection initiale.
Le pyomètre correspond à une accumulation de pus, qui elle-même est le fruit d'une infection - par exemple bactérienne. Ainsi, il est la conséquence d’une infection par des bactéries (métrite), qui se mettent à proliférer dans l’utérus au point de devenir anormalement nombreuses et donc dangereuses.
Une telle prolifération peut survenir à n’importe quel moment. Le risque est toutefois augmenté dans les 3 à 8 semaines qui suivent chaque période de chaleur de la chatte, car l’utérus est pour des raisons hormonales plus vulnérable aux infections pendant cette période que le reste du temps.
D’autres facteurs de risque existent, les principaux étant :
Enfin, certaines races comme le Sphynx pourraient être davantage sujettes au pyomètre que les autres. C’est en tout cas ce qu’ont constaté des chercheurs suédois qui se sont intéressés à plus de 1000 chattes entières entre 1999 et 2006. Ils ont consigné les résultats de leurs travaux dans une étude intitulée « Incidence of pyometra in Swedish insured cats » et publiée en 2014 dans le journal Theriogenology.
Comme le pyomètre se développe à l’intérieur de l’utérus, il n’est pas possible de le voir, contrairement par exemple à une infection localisée au niveau de la peau ou à l’intérieur de la bouche. Toutefois, il occasionne rapidement divers symptômes qui, eux, sont bien visibles, même s’ils ne font pas toujours penser directement à une infection utérine.
Les symptômes ne sont toutefois pas exactement les mêmes selon qu'il s'agit d'un pyomètre à col ouvert ou d'un pyomètre à col fermé.
Lorsque le col de l’utérus est ouvert, le pyomètre est facile à détecter, car le pus peut s’écouler par le vagin puis par la vulve. Les symptômes ayant le plus de chances d’apparaître sont alors :
Ces différents symptômes attirent rapidement l’attention sur le fait que quelque chose ne va pas, et l’écoulement vaginal évoque sans réelle ambiguïté un problème situé au niveau de l'appareil reproducteur. Le diagnostic est donc généralement assez aisé.
En parallèle, surviennent parfois une augmentation de la soif et des urines, ainsi que des vomissements. Ces symptômes sont bien moins fréquents, sans pour autant être rares. Ils peuvent finir par conduire à une déshydratation.
Si la prise en charge est rapide, le pyomètre se soigne généralement bien, même s’il nécessite le plus souvent une grosse opération chirurgicale. En revanche, si rien n'est fait, les bactéries peuvent finir par se répandre dans tout l’organisme et causer une septicémie, voire le décès de l'animal.
Dans le cas d’un pyomètre à col fermé, le pus qui se forme dans l’utérus n’a pas de moyen de s’échapper : aucun écoulement particulier n’est donc présent au niveau de la vulve. En revanche, comme il s’accumule dans l’organisme, il cause une distension abdominale (c'est-à-dire une expansion anormale de l'abdomen) potentiellement douloureuse au toucher, ainsi que parfois une congestion du vagin ou de la vulve.
Les autres symptômes sont globalement identiques à ceux d'un pyomètre à col ouvert : on observe là aussi généralement un abattement, une perte d'appétit, ainsi que parfois des vomissements et/ou une soif et des mictions importantes, susceptibles là encore de causer une déshydratation. Ils peuvent toutefois être un peu plus intenses, car l’accumulation de pus dans l’utérus aggrave l’infection.
Le pronostic est lui aussi plus mauvais. En effet, une septicémie voire le décès peuvent survenir rapidement, surtout en l’absence de prise en charge. Or, comme les symptômes sont peu spécifiques (nettement moins en tout cas que ceux d'un pyomètre à col ouvert), le diagnostic n’est pas évident à faire - ce qui retarde d’autant la mise en place d’un traitement.
Comme le pyomètre peut rapidement évoluer vers une septicémie et potentiellement un décès, la prise en charge doit être la plus rapide possible, pour maximiser les chances de survie et limiter le risque de séquelles.
Deux types de traitement sont possibles : une opération chirurgicale d'une part, l’utilisation de médicaments d'autre part. C’est la première option qui est presque toujours retenue, car elle est bien plus efficace et élimine totalement le risque de rechute.
Le traitement chirurgical est la meilleure option pour soigner un pyomètre : par conséquent, c’est celui qui est généralement recommandé et pratiqué.
Il consiste à retirer les ovaires et l’utérus, et ce faisant à stériliser la chatte. Certes, cette dernière n’est alors plus capable de se reproduire, et l’opération est relativement lourde (elle se passe d'ailleurs sous anesthésie générale), mais c’est le moyen le plus rapide et le plus sûr de la débarrasser de l’infection et de limiter le risque de rechute.
Le traitement chirurgical est parfois suivi d’une antibiothérapie pendant quelques jours à semaines, dans le but d’éradiquer les bactéries qui pourraient avoir eu le temps de se répandre dans l’organisme avant la prise en charge. Enfin, l’animal peut être placé sous perfusion à son réveil pendant quelques jours s’il existe un risque de déshydratation – notamment en cas de vomissements et/ou de volume d’urine accru.
Le taux de réussite de l’opération est très bon : il avoisine les 100%, en tout cas tant que l’infection ne s’est pas propagée et que l’état de santé de l’animal n’est pas trop dégradé. En outre, le risque de rechute est nul.
L’opération chirurgicale est à ce jour le meilleur traitement existant contre le pyomètre, mais elle peut être déconseillée dans certains cas - notamment si la chatte est trop âgée et/ou faible pour la supporter. Le cas échéant, le vétérinaire propose de se rabattre pendant quelques jours à semaines sur des médicaments tels que des antibiotiques pour chat et des injections hormonales. En outre, une mise sous perfusion peut là aussi être utile en cas de déshydratation.
L’inconvénient du traitement médicamenteux est qu’il est globalement moins efficace que l’opération, et surtout beaucoup plus lent pour produire ses effets : il peut se passer plusieurs jours à semaines pour constater une diminution de l’infection utérine, et donc du pyomètre. Si ce dernier est déjà avancé, le risque qu’une septicémie survienne dans l’intervalle est réel.
En outre, le traitement médicamenteux n’empêche aucunement les rechutes, qui sont d’ailleurs fréquentes dans les mois ou années qui suivent.
Une étude intitulée « Pyometra in Cats: Medical Versus Surgical Treatment » et publiée en 2020 dans le Journal of Current Veterinary Research a d’ailleurs cherché à comparer l’efficacité de l’opération chirurgicale et celle de deux traitements médicamenteux. Le constat est sans appel : le taux de survie dans les deux ans était de 100% avec la première, contre 60% avec les seconds. Quant au taux de rechute dans les deux ans, il était de 0% dans le cas de l'opération, et compris entre 25 et 35% dans celui des médicaments - en fonction des molécules utilisées. Ces écarts sont loin d’être négligeables...
Enfin, le traitement médicamenteux peut - comme d'ailleurs pour n'importe quelle autre maladie - provoquer des effets secondaires, en particulier des troubles digestifs : maux de ventre, diarrhée...
Ainsi, il présente bien plus d'inconvénients que l'opération. Cela étant, ces différents risques sont bien moins graves que ceux liés à un pyomètre non soigné. Par conséquent, s'il n'est pas possible de faire opérer son chat, il n'y a aucune hésitation à avoir : mieux vaut tenter le traitement médicamenteux que ne rien faire du tout.
Le coût du traitement du pyomètre d’une chatte est loin d’être négligeable : il faut compter généralement entre 200 et 300 euros, que l'option retenue soit l’opération chirurgicale ou les médicaments. À titre de comparaison, le prix de la stérilisation d’une chatte est de l’ordre de 100 ou 150 euros, soit environ moitié moins.
Si on a pris soin de souscrire une assurance santé pour son compagnon, celle-ci est susceptible de prendre en charge tout ou partie de ces dépenses, ce qui allège la facture. Il faut toutefois pour cela qu’elle ait été souscrite avant l'apparition du pyomètre, et que la chatte ne soit pas concernée par une des éventuelles clauses d'exclusion prévues dans le contrat. En particulier, un certain nombre de formules prévoient une limite d’âge au-delà de laquelle les dépenses vétérinaires ne sont plus remboursées : or, le pyomètre intervient le plus souvent alors que l’animal a déjà un certain âge...
Mieux vaut donc prendre le temps de bien se renseigner et de comparer différentes offres lorsqu’on souhaite trouver une mutuelle pour son chat : cela permet d’éviter les mauvaises surprises.
Même si le pronostic est globalement bon en cas de prise en charge rapide, le pyomètre est un problème de santé grave, car il peut rapidement dégénérer en septicémie. De plus, l’opération chirurgicale qui permet de le traiter efficacement est lourde : toutes les chattes ne sont pas forcément en état de la supporter.
Il est donc important de miser sur la prévention, sachant qu'il existe effectivement des moyens de réduire la probabilité que le problème survienne - notamment la stérilisation.
Faire stériliser une chatte est le meilleur moyen de prévenir le pyomètre, ainsi que de limiter le risque que d'autres problèmes de santé touchant l’appareil génital surviennent (notamment des tumeurs mammaires). De fait, si l’on n’a pas prévu de la faire se reproduire, il n'y a quasiment que des avantages à la faire stériliser.
Cela suppose une ovariectomie ou une ovariohystérectomie : dans le premier cas, seuls ses ovaires sont retirés ; dans le second, son utérus est également enlevé. Dans un cas comme dans l’autre, la chatte ne peut évidemment plus se reproduire, mais le risque qu’elle contracte un pyomètre à l’avenir devient nul.
Cette intervention coûte environ deux fois moins cher que l’opération chirurgicale permettant de la guérir en cas de pyomètre. Y avoir recours peut donc s'avérer gagnant sur le plan économique, a fortiori dans le cas d'une chatte prédisposée à ce problème.
Les moyens contraceptifs pour chat augmentent le risque de pyomètre, a fortiori s’ils sont utilisés sur le long terme.
Mieux vaut donc autant que possible éviter d’y avoir recours. Du reste, dès lors qu’on ne souhaite pas faire reproduire sa chatte, il est préférable de la stériliser. Si l'on a recours malgré tout à la contraception, mieux vaut que cela reste exceptionnel, et le faire sous la surveillance d’un vétérinaire.
Faire avorter une chatte avec des médicaments augmente le risque de pyomètre, en raison des substances que ceux-ci contiennent - au même titre d'ailleurs que les contraceptifs. Mieux vaut donc l’éviter autant que faire se peut.
Il arrive malgré tout qu’il faille y avoir recours. C'est le cas par exemple si la gestation se passe mal et qu'il y a un risque prononcé pour la mère et/ou les chatons, mais que pour autant une stérilisation n’est pas souhaitable. L'avortement médicamenteux est alors la meilleure option.
Cela doit toutefois rester aussi exceptionnel que possible : comme pour une femme, un avortement n'est jamais anodin et ne va pas sans risques, même s'il est effectué à l'aide de médicaments.
En général, une chatte qui met bas gère tout elle-même, et il n’est pas vraiment nécessaire d’intervenir. Mieux vaut malgré tout surveiller que tout se passe bien, et se tenir prêt à agir en cas de besoin : c’est le meilleur moyen de prévenir un pyomètre, ainsi d'ailleurs que d’autres complications - dont certaines potentiellement tout aussi graves.
En particulier, il est important de vérifier qu’aucun placenta ni même fœtus mort-né ne reste coincé dans l’utérus, car il pourrait alors se nécroser et provoquer une infection utérine. Pour cela, il convient de s’assurer qu’il y a autant de placentas expulsés que de chatons nés, et que la taille de la portée correspond à ce qui avait été estimé lors des échographies. En cas de doute, mieux vaut contacter un vétérinaire sans trop attendre.
Si jamais la mise bas est difficile et les petits ne semblent pas vouloir sortir (ce qui est rare chez le chat, mais peut malgré tout se produire), l’aide d’un vétérinaire est souvent recommandée pour faciliter les choses. En tout état de cause, l’utilisation de gants et d’instruments stérilisés est impérative en cas d'intervention, pour limiter le risque d'infection pendant les manoeuvres obstétricales.
Enfin, il faut s’assurer que la chatte ne présente pas de pertes vaginales suspectes (c’est-à-dire malodorantes et/ou ayant une couleur inhabituelle) dans les jours qui suivent la mise bas : cela pourrait être le signe d’un pyomètre. Le cas échéant, il faut se tourner vers un vétérinaire sans attendre, afin qu'un diagnostic soit établi le plus tôt possible.
Grave mais pas toujours facile à détecter, le pyomètre correspond à une accumulation de pus dans l'utérus, à la suite d’une infection bactérienne. Différents facteurs de risques existent, mais dans l’ensemble, ce sont les chattes non stérilisées et déjà assez âgées qui sont touchées. Dans tous les cas, l’issue peut être fatale en l’absence d’intervention rapide : il n'y a pas une minute à perdre si l’on soupçonne un pyomètre chez son animal.
Le traitement le plus efficace - et de loin - consiste en une opération chirurgicale pour retirer l'utérus. Si cette dernière n'est pas possible, divers médicaments peuvent être administrés, mais leur efficacité est limitée.
Cela étant, l’idéal est évidemment de limiter au maximum les chances qu’une telle infection survienne. Le meilleur moyen d'y parvenir est de faire stériliser sa chatte, dès lors qu'elle n’est pas destinée à la reproduction. C'est d'autant plus vrai que par la même occasion on réduit - voire supprime - le risque d’autres maladies de l’appareil génital.