En Europe, et notamment sur le pourtour du bassin méditerranéen, les chenilles processionnaires du pin sont chaque année de plus en plus nombreuses. Elles n'en ont l'air, mais leurs longs poils très urticants représentent un véritable danger pour les humains et les animaux.
Même s'ils sont généralement moins concernés que les chiens en raison de leur prudence naturelle, le nombre de chats touchés semble augmenter depuis quelques années. Les vétérinaires cherchent donc à sensibiliser les maîtres, et les inciter à ne pas négliger ce risque.
En quoi les chenilles processionnaires sont-elles dangereuses pour le chat ? Comment réagir s'il a été touché ? Comment protéger son chat contre les chenilles processionnaires ?
La chenille processionnaire du pin, aussi appelée processionnaire du pin ou plus simplement chenille processionnaire, est la larve (chenille) d'une espèce de papillon nocturne appelé Thaumetopoea pityocampa, qui vit dans les pays autour du bassin méditerranéen, notamment la France.
Elle mesure environ 4 cm de long, et possède un corps marron et/ou noir recouvert de longs poils blancs. Elle a été ainsi nommée en raison de sa façon caractéristique de se déplacer, en impressionnantes files indiennes pouvant facilement compter plusieurs dizaines d'individus.
Elle est tristement célèbre en raison non seulement des dégâts qu'elle cause sur les arbres dont elle se nourrit (notamment les pins), mais aussi des graves réactions allergiques que ses poils sont susceptibles de provoquer chez les humains et les animaux. Le plus grand risque d'accidents se situe au printemps, car c'est le moment où elle quitte son arbre et se déplace au sol pour poursuivre son développement.
Elle ne doit pas être confondue avec sa cousine la processionnaire du chêne (Thaumetopoea processionea), elle aussi recouverte de poils très urticants, mais malgré tout beaucoup moins dangereuse car elle ne quitte jamais le sommet des arbres.
C'est à l'automne que la femelle pond ses oeufs - généralement autour de 200 - dans un arbre. Elle choisit de préférence une espèce de pins pour cela, mais faute de mieux, elle peut se rabattre vers d'autres conifères, comme des sapins ou des cèdres.
L'éclosion des oeufs se produit généralement 5 à 6 semaines après la ponte : il en sort de minuscules chenilles d'à peine quelques millimètres de long, qui commencent aussitôt à grignoter les aiguilles de l'arbre où elles se trouvent. Dans le même temps, elles construisent un gros cocon de soie blanc de forme caractéristique, qui leur sert d'abri contre le froid et la pluie. Elles le bâtissent de préférence au sommet de l'arbre ou à l'extrémité d'une branche, et s'y transforment peu à peu jusqu'à atteindre environ 4 cm de long.
En mars-avril, lorsque le printemps commence à poindre, les chenilles processionnaires ne peuvent plus rester dans leur nid, car elles ont besoin de s'enfouir dans la terre pour continuer à grandir et se transformer en papillons adultes. Elles descendent donc de leur arbre en formant d'immenses processions en file indienne, et partent à la recherche de l'endroit idéal pour s'enterrer. C'est à ce moment-là qu'elles peuvent croiser la route des humains et des chats, et qu’elles sont donc le plus dangereuses pour eux.
Une fois dans la terre, chaque chenille consacre de longs mois à se transformer d'abord en chrysalide puis en papillon adulte. Une fois cette métamorphose achevée (généralement vers la fin de l'été / le courant de l'automne), elle sort de terre et s'envole pour trouver un partenaire de reproduction. Après l'accouplement, le mâle meurt presque aussitôt ; quant à la femelle, elle a juste le temps de pondre ses oeufs dans un conifère avant de s'éteindre à son tour.
Les chenilles processionnaires sont très sensibles au froid, à l'humidité et aux intempéries : elles sont donc naturellement davantage présentes dans les zones où les hivers sont doux et secs. C'est ce qui explique qu'elle a pendant longtemps été cantonnée aux parties méridionales du continent européen, aux pays bordant la Méditerranée (Maghreb, Liban, etc.) et au littoral atlantique français.
Toutefois, en raison du réchauffement climatique constaté ces dernières décennies, les hivers ont tendance à être de plus en plus courts et de moins en moins froid. La chenille processionnaire en a donc profité pour proliférer et étendre son territoire année après année : désormais, elle est présente sur 80% du territoire français, et des foyers ont été observés en Belgique, en Suisse, en Autriche et en Allemagne. Selon les scientifiques, elle progresserait ainsi vers le nord d'environ 5 km par an. Il faut dire qu'elle n'a que peu de prédateurs naturels : seuls quelques oiseaux comme le coucou et la mésange huppée se nourrissent de ces chenilles.
Lorsqu'elles quittent leur cocon pour s'enfouir dans le sol, les chenilles processionnaires sont amenées à croiser la route des humains et/ou des animaux domestiques. C'est à ce moment précis qu'elles représentent le plus grand danger.
En effet, leur corps est recouvert de poils peu visibles, très volatils, et surtout très urticants (c’est-à-dire fortement irritants). Ce pouvoir urticant est dû à la présence d'une toxine appelée thaumatopoéine, qui permet aux chenilles de se défendre contre les prédateurs à un moment de leur vie où elles sont particulièrement vulnérables. Si ces poils entrent en contact avec la peau ou les muqueuses d'un Homme ou d'un animal, une réaction se déclenche immédiatement : rougeur, brûlures, démangeaisons, voire choc anaphylactique pour les sujets très enclins aux allergies.
Cela étant, les chats sont beaucoup moins exposés à ce danger que les chiens, car ils font généralement preuve d'une grande méfiance à l'égard de ce qu'ils ne connaissent pas. Le risque existe tout de même, en particulier chez les individus un peu trop curieux - notamment les chatons.
En cas de contact avec des poils de chenilles processionnaires, le chat développe une violente réaction allergique couplée à une irritation locale.
Les symptômes ne mettent que quelques minutes à apparaître, la réaction étant quasi instantanée. Les zones les plus touchées sont généralement les pattes avant, ainsi que la bouche si jamais l'animal se lèche pour soulager ses douleurs.
Les chats explorent leur environnement avec leurs pattes avant. S'ils rencontrent sur leur chemin des chenilles processionnaires et sont intrigués par ces curieuses bestioles, il y a donc des chances qu'ils tentent de les toucher et/ou de les attraper avec leurs pattes. Les symptômes sont alors cutanés.
En cas de contact avec les poils, on observe ainsi sur la peau une multitude de petits boutons rouges, des démangeaisons, et un gonflement local pouvant être douloureux. Il est donc probable que le chat se lèche au niveau de la piqûre pour se soulager : le risque est alors qu'il avale des poils de chenille et que la réaction se propage à la bouche voire la gorge.
Si le chat lèche et/ou avale des poils de chenille processionnaire, des symptômes se manifestent au niveau de la bouche ou de la gorge.
On constate bien souvent un gonflement important du museau et des muqueuses susceptible de gêner la respiration, une hypersalivation qui le fait baver, ainsi qu'une gêne qui le conduit à se gratter avec les pattes.
En cas de contact des poils avec la langue, il existe un risque de nécrose grave, avec des séquelles irréversibles voire une incapacité à boire et s'alimenter.
Si des poils de chenilles processionnaires entrent en contact avec les yeux, ils déclenchent une vive réaction au niveau de la cornée, qui peut l'endommager gravement voire de manière irréversible.
Les principaux symptômes sont une conjonctivite, une inflammation de la cornée, un oeil rouge et gonflé, et une difficulté à ouvrir la paupière.
En l'absence de prise en charge rapide, il existe un risque important de cécité au niveau de l'oeil atteint.
En plus des symptômes précédents, des symptômes plus généraux sont possibles, en particulier en cas de violente réaction allergique.
Les principaux observés sont un abattement, de la fièvre, des convulsions, des problèmes rénaux, des difficultés respiratoires... Si le choc anaphylactique est sévère, le chat peut même en mourir.
Même si ce n'est pas le cas général, un chat qui se fait piquer par une chenille processionnaire risque de subir un choc anaphylactique, c'est-à-dire une réaction allergique très violente qui survient en quelques minutes. Sans prise en charge immédiate, l'issue peut être fatale.
En plus de ce risque, les poils de chenilles processionnaires entraînent de graves brûlures potentiellement irréversibles sur la peau, la bouche, les yeux, la langue... Les atteintes dans la gueule sont les plus graves, car elles peuvent aller jusqu'à empêcher l'animal de manger, boire, voire même respirer. La seule solution possible est alors bien souvent de le faire euthanasier...
Tous les chats sont susceptibles de développer de telles complications à la suite d'une piqûre de chenille processionnaire. Le risque est toutefois plus grand chez les chatons, les chats âgés, et ceux prédisposés aux allergies.
Si un chat se fait piquer par une chenille processionnaire, il est peu probable que cela passe inaperçu, tant les symptômes sont visibles et brutaux. La réaction doit être immédiate, car quel que soit l'endroit atteint, il s'agit d'une urgence vétérinaire.
La première chose à faire est laver immédiatement la partie du corps touchée avec de l'eau et du savon, pour la débarrasser des poils urticants qui pourraient être encore présents. Pour autant, il ne faut pas frotter, pour ne pas aggraver l'irritation. Mieux vaut porter des gants pour procéder à ce nettoyage, pour éviter de se faire soi-même piquer.
Dès que cette étape est faite, il faut aussitôt se rendre chez un vétérinaire, non sans l'avoir d'abord informé de la situation, pour s'assurer qu'il est bien disponible. Le traitement à mettre en place comprend des antihistaminiques (c'est-à-dire des médicaments contre les réactions allergiques), des anti-inflammatoires et/ou des antidouleurs, en fonction des situations. Il n'existe toutefois pas de médicament miracle, raison pour laquelle il est essentiel d'agir vite pour éviter les séquelles.
Si les atteintes sont trop sévères, il peut être nécessaire de recourir à une opération chirurgicale pour retirer les tissus endommagés et éviter la gangrène.
Pour éviter les accidents avec les chenilles processionnaires, mieux vaut se montrer prudent et agir de manière préventive.
Lorsqu'on vit dans une région à risque, il est important de surveiller les branches des arbres (notamment des pins) à partir de la fin de l'hiver et pendant le printemps, afin de détecter rapidement les nids si jamais il y en a. Heureusement, étant données leur taille et leur localisation, ces derniers sont très visibles.
Même si l'on vit dans une région habituellement épargnée par les processionnaires, mieux vaut tout de même rester sur ses gardes et surveiller de temps en temps l'état des arbres, car ces chenilles tendent à gagner du terrain chaque année.
Si jamais l'on repère des nids de chenilles processionnaires sur certains arbres, une solution à la fois simple et écologique pour éviter les accidents et protéger son chat consiste à installer des écopièges.
Le principe de ces dispositifs est très simple : il s'agit d'un bac que l'on fixe autour du tronc d'un arbre et auquel est rattaché un sac ou un flacon en plastique. Lorsque les chenilles descendent de l'arbre pour rejoindre le sol, elles s'infiltrent dans le bac puis tombent dans le sac ou le flacon, dont elles ne peuvent pas ressortir. Après la saison à risque, il ne reste qu'à jeter le récipient puis à le remplacer, pour préparer l'année suivante.
Les écopièges coûtent autour de 35 euros pièce, et sont disponibles dans les jardineries, dans les commerces de vente de produits contre les animaux nuisibles, ou même sur des sites de vente en ligne.
Si on a des nids à proximité de son domicile et/ou son jardin, il est possible de croiser des chenilles au sol, lorsque ces dernières quittent leur arbre pour s'enfouir dans le sol et continuer leur évolution.
Si jamais cela se produit, il faut prévenir les autorités sanitaires du lieu concerné, afin que ces derniers se chargent d'éliminer les chenilles ainsi que les cocons à proximité. Mieux vaut éviter de le faire soi-même, car le moindre contact avec des poils peut causer de graves brûlures.
Une fois que les chenilles ont été éliminées, il ne reste plus qu'à laver à grande eau le sol, pour s'assurer qu'il ne reste pas de poils urticants qui pourraient plus tard déclencher une réaction si un chat passait par là.
Malgré le risque qu’elles représentent, la présence de chenilles processionnaires ne doit pas conduire à paniquer : il faut apprendre à vivre avec. Certes, leur contact est dangereux pour le chat, mais il est tout à fait possible de réduire le risque de mauvaise rencontre. Les règles d’or à observer sont d’être vigilant, d’observer son environnement et de détruire les chenilles au sol. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à demander conseil à son vétérinaire, pour savoir comment se protéger et protéger son compagnon.
À noter qu'il existe également en Europe occidentale des chenilles processionnaires du chêne, qui provoquent les mêmes symptômes. Toutefois, elles sont beaucoup moins dangereuses car, contrairement à leurs cousines du pin, elles ne descendent jamais au sol.