Certes, les chats sont d’adorables petites boules de poils que l’on a inexorablement envie de caresser. Toutefois, ils sont pourvus de griffes rétractables, qui leur servent notamment à chasser, à jouer ou encore à marquer leur territoire. Dans certains cas, ils peuvent se montrer agressifs et les utiliser pour se défendre ou tenir à l’écart quiconque souhaite les manipuler ou même simplement les approcher.
Que ces griffures soient occasionnelles ou habituelles, il est utile de comprendre pourquoi un chat griffe, et de savoir comment éviter que le gentil matou se transforme en dangereux prédateur.
Qu’est-ce qui conduit un chat à griffer ? Peut-on savoir quand un chat est sur le point de griffer ? Comment se prémunir du risque de griffure par un chat ?
Dans la plupart des pays, il est obligatoire de déclarer officiellement toute morsure de chien, que celui-ci soit ou non connu de la victime. Ceci permet de disposer de statistiques et de rapports sur le phénomène.
Il n’en va toutefois pas de même pour les griffures de chats à l’encontre des humains. En effet, contrairement aux chiens, rien n’est prévu légalement les concernant. N’étant pas comptabilisées, il est donc impossible de connaître le nombre de personnes victimes chaque année d’une griffure de chat.
En revanche, à défaut de chiffres sur les griffures elles-mêmes, on dispose de statistiques sur la principale maladie qu’elles transmettent : la lymphoréticulose bénigne d’inoculation, ou maladie des griffes du chat. Présente partout dans le monde, elle touche surtout les enfants et personnes de moins de 20 ans : selon le territoire étudié, ces populations représentent de 55 à 80 % des cas. Selon une étude des chercheurs Christina A. Nelson, Shubhayu Saha et Paul S. Mead portant sur des données de 2005 à 2013 et dont les résultats furent publiés en 2016 au sein d’un article intitulé « Cat-Scratch Disease in the United States, 2005–2013 » paru dans la revue scientifique spécialisée Emerging Infectious Diseases, environ 13 000 cas de maladie des griffes du chat par an chez l’humain surviennent aux États-Unis, tandis que la bactérie est présente chez un tiers des chats. En France, selon les chiffres de l’Assurance Maladie, on dénombre chaque année un peu moins de 3500 cas sur le territoire.
Il y a plusieurs raisons qui peuvent conduire un chat à griffer. En effet, il ne faut pas oublier que le chat fait partie de la famille des félins et dispose à ce titre de griffes et de crocs, dont il se sert instinctivement dans certaines situations.
Quel que soit l’objet ou l’animal touché, certaines petites griffures sont anodines, mais il peut aussi se servir de ses griffes de manière plus appuyée, par exemple lorsqu’il s’agit de marquer son territoire ou lors d’un jeu un peu vif. Il peut aussi se montrer réellement agressif lorsqu’il se trouve dans une situation stressante ou effrayante, et dans ce cas ses griffures sont évidemment violentes, puisqu’elles se doivent d’être le plus efficaces possible dans l’optique de se défendre.
Dans tous les cas, il est utile de connaître les principales raisons pouvant conduire un chat à griffer…
Le chat est un animal joueur et chasseur par instinct. Ses griffes sont un moyen pour lui d’attraper ses proies puis de jouer avec avant de les tuer. Ce comportement étant inscrit dans ses gènes, même un chat d’intérieur, qui n’a pourtant pas besoin de chasser, agit ainsi avec tout ce qu’il trouve – y compris potentiellement votre main ou votre pied.
De fait, les chats ont besoin d’être stimulés intellectuellement et physiquement afin que leurs instincts de chasseurs soient assouvis. C’est pourquoi il est important de mettre des jouets pour chat à disposition de son compagnon et de prendre du temps quotidiennement pour jouer avec lui. Il pourra se défouler sur ces derniers, les mordre et les griffer comme bon lui semble, sans danger pour son maître.
Il est en revanche nécessaire de lui faire comprendre que vous n’êtes pas une souris ou un objet avec lequel il peut jouer, et donc qu’il ne doit pas vous griffer. Cela suppose notamment de ne pas l’habituer à jouer avec votre main : ceci peut être très amusant et indolore lorsque c’est encore un chaton, mais le jour où il sera devenu adulte, il risque de vous faire vraiment mal. Pour éviter que votre chat ne soit enclin à prendre votre main pour un jouet, il est important de lui procurer des objets avec lesquels il peut jouer et se défouler. L’idéal est bien sûr des jouets pour chat avec lesquels il peut s’amuser tout seul, comme une balle ou une souris jouet. Mais si vous prévoyez aussi des jouets permettant aux humains de le stimuler, privilégiez des objets préservant une certaine distance avec la main, comme par exemple une canne à chat. Il pourra ainsi griffer et mordre à son aise sans risquer de vous blesser : tout le monde y gagne !
Le chat n’aime pas vraiment être surpris. S’il se sent en danger et pris au piège, dans l’incapacité de fuir, il se met à se défendre – rien que de très normal, en somme. Or, un coup de griffes bien senti est précisément un excellent moyen de se défendre.
Cependant, comme c’est un animal craintif, il est assez facilement surpris. C’est le cas par exemple s’il est réveillé brutalement ou encore si un bruit intense retentit : il a alors de grandes chances de se mettre à griffer par réflexe de défense.
Pour limiter le risque de griffures du chat causées par un réflexe défensif face à une source de peur, tâchez de toujours garder un comportement calme et précautionneux à son égard : ne lui criez pas dessus, ne lui courez pas après, et bien entendu ne le frappez pas (même une petite tape sur les fesses peut être très anxiogène pour lui). En effet, vous ne feriez alors qu’engendrer peur et méfiance.
Animal routinier et territorial, le chat est très sensible aux changements : ils ont tôt fait de provoquer chez lui un état de stress plus ou moins prononcé. Ainsi, suite à un bouleversement dans ses habitudes (déménagement avec son chat, nouvel arrivant dans la famille, séjour en pension ou départ en vacances avec son chat, etc.), le risque est grand qu’il soit très stressé, et que ce stress du chat se traduise par une certaine agressivité. Il peut alors par exemple griffer et/ou mordre sans raison apparente, et sans le moindre avertissement préalable.
Si vous pensez que votre compagnon souffre de stress, il est possible d'utiliser un diffuseur de phéromones pour chat afin de l’apaiser. Si cela ne suffit pas, ou si vous souhaitez disposer d’options supplémentaires, demandez conseil à votre vétérinaire pour qu’il vous aide à choisir la meilleure solution pour que le chat stresse moins.
Un animal qui a mal quelque part est inévitablement agressif. Par conséquent, si votre compagnon vous griffe (ou essaye de le faire) lorsque vous le touchez ou le caressez à un endroit précis, c’est un signal auquel vous ne pouvez pas rester indifférent : il est fort possible qu’il ait mal à cet endroit-là.
En procédant tout en douceur, essayez donc de regarder de plus près afin de voir s’il y a une plaie ou une grosseur. Néanmoins, s’il se montre agressif lorsque vous le manipulez pour essayer d’y voir plus clair, n’insistez pas, au risque de vous exposer à un risque de griffure : emmenez-le directement chez le vétérinaire, qui sera en mesure de déterminer ce qu’il en est.
Cela dit, une blessure n’est pas forcément la seule cause possible : il se peut aussi qu’il vous griffe car vous manipulez une zone qu’il n’apprécie pas qu’on touche. En effet, bon nombre de chats ont des zones dites sensibles, et n’aiment donc pas qu’on les caresse à cet endroit précis. Chez la plupart des individus, la zone la plus sensible se situe sur le ventre, mais pour d’autres, elle se situe plutôt sur le dessus de la tête. Au passage, il faut se méfier d’éventuelles incompréhensions : ce n’est pas parce qu’un chat roule sur le dos ou approche sa tête et semble demander des caresses qu’il souhaite que ces dernières soient justement à cet endroit-là. Si un chat griffe lorsqu’on le touche à un endroit sensible pour lui, c’est simplement un moyen pour lui de dire « Non, pas là ».
Il existe chez le chat ce qu’on appelle le « syndrome du tigre », qui est principalement lié à la nourriture. En effet, un chat qui ne mange pas à sa faim, dont l’alimentation n’est pas adaptée (trop pauvre en protéines, par exemple) ou distribuée de manière inadéquate (un seul repas par jour, au lieu d’être disponible en permanence) peut accumuler de la frustration qui peut finir par le mettre comme dans un état second et le conduire à agresser son maître de manière très violente.
Si votre chat s’en est pris à vous ou vous semble sur le point de le faire et que vous pensez qu’il est atteint du « syndrome du tigre », parlez-en sans tarder à votre vétérinaire qui pourra vous aider à identifier ce qui ne va pas dans la façon dont vous l’alimentez et à changer ce qui doit l’être pour mettre fin au problème.
Si elles ne sont pas liées à la douleur, il est souvent possible de détecter des signes annonciateurs des griffures de chat.
En effet, même s’il est forcé, contraint ou se sent dérangé, un chat ne griffe généralement pas d’emblée. Il essaye d’abord de faire comprendre par son attitude à l’importun (qu’il s’agisse d’un humain, d’un congénère ou d’un autre animal) qu’il y a un problème, et qu’il faut cesser. Il est important de savoir reconnaître ces signaux, car le langage corporel du chat est le seul moyen dont il dispose pour s’exprimer – d’ailleurs, ses congénères, eux, le comprennent parfaitement.
Ainsi, les pupilles dilatées, la queue qui remue, les oreilles en arrière, un feulement ou un coup de patte (sans sortir les griffes) sont autant de manifestations qu’il faut interpréter comme des signaux d’agacement et/ou des avertissements. S’ils sont ignorés, l’étape suivante est l’agressivité à proprement parler : le chat griffe ou mord pour signifier qu’il veut qu’on le laisse tranquille.
Les chats ont des personnalités et des caractères différents : certains sont plus patients ou moins craintifs que d’autres, si bien qu’il faut davantage les pousser dans leurs retranchements pour déclencher une réaction agressive et potentiellement une griffure. Ainsi, on peut difficilement établir dans l’absolu des races de chat agressives et d’autres qui ne le seraient pas, car tout dépend avant tout de l’individu et de son vécu. Par conséquent, il revient certes à chaque maître d’essayer de façonner la personnalité de son compagnon en particulier dès son plus jeune âge, mais aussi de bien cerner sa personnalité afin d’interagir avec lui de manière adéquate.
Il n’en reste pas moins que même le plus placide des chats demeure un félin : pour lui, griffer est un comportement instinctif dans certaines situations. On ne peut pas attendre d’un chat qu’il aille à l’encontre de sa nature profonde.
Il faut cependant noter que, quelle que soit sa race, chat qui n’a pas été totalement sevré par sa mère est plus fragile émotionnellement, si bien que son seuil de tolérance face à ce qu’il considère comme une agression (et qui exige donc une réponse du même acabit) a des chances d’être plus faible. En effet, une maman chat apprend à ses petits les autocontrôles, c’est-à-dire la maîtrise et la modération de l’intensité de ses morsures et de ses griffures. Il est donc primordial de respecter la règlementation concernant l’âge minimum auquel un chaton peut être cédé – et donc séparé de sa mère. Il est le plus souvent fixé à l’âge de 8 semaines – c’est le cas notamment en France, en Belgique, en Suisse ou encore au Québec. Néanmoins, mieux vaut dans l’idéal d’attendre trois mois, afin que le sevrage du chaton et son éducation soient vraiment terminés lorsqu’il est séparé de sa mère.
Même si elle est superficielle et/ou isolée, toute griffure doit être soignée rapidement, surtout si le chat qui en est à l’origine est inconnu et/ou que la personne griffée est fragile (enfant en bas âge, personne âgée ou déjà malade, etc.). En effet, les griffes des chats sont porteuses de germes, bactéries et éventuellement champignons qui peuvent provoquer des infections voire des maladies graves comme la pasteurellose, la lymphoréticulose bénigne d’inoculation (maladie des griffes du chat) ou encore la sporotrichose (principalement dans les zones tropicales).
Il faut donc sans attendre laver la plaie avec de l’eau savonneuse, puis la désinfecter avec un antiseptique (type Bétadine), et si nécessaire mettre un pansement ou gaze pendant quelques jours afin de la protéger.
En général, les griffures de chat guérissent spontanément, aucune infection ne se déclare et aucun médicament n’est utile. Si la plaie n’est pas profonde, il n’est pas forcément obligatoire de consulter un médecin, à moins qu’elle ne se situe sur une muqueuse ou près de l’œil. Dans ces deux cas, mieux vaut de toute façon consulter un docteur rapidement.
Il est important de nettoyer et désinfecter quotidiennement la plaie et de surveiller qu’aucun autre symptôme n’apparaisse. Si elle est superficielle, un nettoyage et un changement de pansement pendant deux ou trois jours suffisent. En revanche, si elle est profonde et qu’elle a été suturée, il est nécessaire de continuer les soins pendant une dizaine de jours.
La période d’incubation pour la pasteurellose et la lymphoréticulose bénigne d’inoculation est de quelques jours à trois semaines, tandis que la sporotrichose peut se développer jusqu’à trois mois après la blessure. En cas de rougeur ou de boursouflure au niveau de la plaie, de fièvre (même légère), de fatigue ou encore de perte d’appétit, il est impératif de consulter le médecin traitant.
Si une maladie infectieuse se déclare après la griffure, le médecin met en place un traitement spécifique. Par exemple, en cas de maladie des griffes du chat ou de pasteurellose, il prescrit des antibiotiques, tandis qu’en cas de sporotrichose, c’est un traitement antifongique qui s’impose.
Dernière recommandation importante, qui vaut en cas de griffure de chat mais aussi de manière générale : vérifiez que votre carnet de vaccination est à jour concernant le vaccin antitétanique (vaccin contre le tétanos). Un rappel tous les vingt ans est recommandé pour les adultes entre 25 et 65 ans, puis un rappel tous les ans au-delà de 65 ans. Si vous n’êtes pas à jour dans vos vaccins, il est recommandé de consulter votre médecin afin d’y remédier.
En cas de griffure, et quelle que soit sa gravité, il n’est pas pertinent de chercher à punir le chat, par exemple en lui donnant une fessée ou un coup de journal. Il a en effet été prouvé que la punition ne fonctionne pas avec un chat, car il ne comprend pas la relation de cause à effet. Pire, elle ne fait que renforcer son anxiété et son stress, avec donc le risque d’entrer dans un cercle vicieux d’agressivité.
Un chat qui griffe n’est pas « fou » : il y a obligatoirement une raison sous-jacente. Il faut apprendre à reconnaitre les signaux permettant de l’identifier et dès lors agir en conséquence. A l’instar des chiens auteurs de morsures, de trop nombreux chats sont chaque année abandonnés ou euthanasiés car les propriétaires les pensent fous ou trop agressifs suite à une griffure, alors qu’ils ont simplement exprimé un mal-être. La seule réponse adaptée est de décrypter ce dernier afin de remédier au problème à la source et que l’animal se sente de nouveau heureux et en sécurité.
Pour ce faire, l’aide d’un comportementaliste félin professionnel peut s’avérer des plus précieuses, puisque cet expert de la psychologique des chats sait interpréter et expliquer les agissements de l’animal. En effet, il n’est pas toujours facile pour le maître de comprendre pourquoi son gentil matou se montre agressif soudainement ou de manière chronique.
Cela dit, la première personne vers qui il convient de se tourner est le vétérinaire, afin d’écarter toute cause médicale. Une fois qu’il est établi que ce n’est pas à ce niveau que se situe le problème, il est utile de consulter un comportementaliste pour chats. En observant l’animal et en vous posant diverses questions, ce dernier analyse le comportement de votre chat ainsi que vos réactions, et vous guide dans l’attitude à adopter afin que le problème de griffure ne se reproduise pas. Une consultation pour un cas de griffure dure généralement de 1h à 1h30 et se déroule de préférence à domicile, afin que le professionnel puisse étudier et observer le chat dans son environnement quotidien. Il faut compter en moyenne autour d’une cinquantaine d’euros de l’heure, et dans la majorité des cas une seule séance suffit à identifier le problème et y remédier.
Contrairement à ce que certaines légendes et superstitions sur les chats ont cherché à faire croire par le passé, votre petite panthère n’est pas un être diabolique qui vous veut du mal. Elle ne demande qu’à être comprise et aimée ; si elle se met à griffer, c’est sûrement en dernier recours, et pour exprimer un mal-être ponctuel ou chronique. En effet, l’agressivité envers les humains est une réaction instinctive en cas de danger ou de grosse frayeur. Dans un environnement sain et apaisé, elle n’a pas lieu d’exister.
Que les griffures soient occasionnelles ou se produisent de manière répétée, punir son chat est tout sauf une solution, car cela ne ferait vraisemblablement qu’empirer les choses. La seule réaction appropriée est de chercher à comprendre pourquoi le chat griffe, en faisant appel si besoin aux professionnels adéquats. Même si la solution ne vous semble pas évidente à première vue, ne perdez pas espoir : très souvent, le problème se règle assez rapidement, et le tigre redevient le mignon petit matou qui vous avait tant fait craquer.
En tout état de cause, ne rien faire et finir par considérer ces griffures comme « normales » est tout sauf une solution, car la situation aurait de grandes chances de se dégrader, aux dépens tant de l’animal que de son maître.