Peut-on être à la fois le plus répandu et le plus méconnu des félins d'Amérique latine ? Le plus familier et le plus bizarre ? C'est ce double paradoxe que combine l'élégant jaguarondi.
Bien qu'il ait été découvert il y a plus de deux siècles, son comportement et sa morphologie sont toujours embrumés de mystères. De fait, ses dimensions peu spectaculaires et sa non rareté ont fait de lui un repoussoir à naturalistes, qui ont généralement privilégié l'étude d'animaux plus remarquables.
Le jaguarondi, dont le nom scientifique est Herpailurus yagouaroundi, est le seul représentant du genre Herpailurus. Parmi toutes les espèces de chats sauvages connues aujourd'hui, c'est du puma qu'il est morphologiquement le plus proche, raison pour laquelle les spécialistes continuent de s'interroger sur la nature du lien qui unit les deux félins.
Les discussions relatives à la taxonomie du jaguarondi ne datent pas d'hier. Lorsqu'il fut découvert par le naturaliste français Geoffroy Saint-Hilaire en 1803, il fut tout d'abord intégré au genre Felis, au même titre que le chat domestique, le chat des sables ou le chat de Biet. Puis, en 1809, un autre naturaliste français nommé Lacépède considéra qu'il était trop éloigné des autres membres de ce genre ; il décida donc de le placer dans un nouveau groupe baptisé Herpailurus (en référence aux mots "herpa" et "ilurus", qui signifient respectivement « rare » en latin et « chat » en grec). L'étrange félin prit alors le doux nom de Herpailurus yaguarondi.
Avec l'apparition de la génétique moléculaire au début des années 2000, soit deux siècles plus tard, la question de la place du jaguarondi dans la classification des félins revint sur la table. Les études réalisées alors estimèrent que lui et le puma provenaient d'une même souche ancestrale et qu'ils étaient étroitement liés sur le plan génétique. Le jaguarondi fut donc placé dans le genre Puma comme son compère, et troqua son nom scientifique d'alors pour Puma yagouaroundi. Toujours d'après ces études, les deux félins ainsi que le guépard descendraient tous trois d'un ancêtre commun ayant vécu il y a plus de 8,5 millions d'années.
Ç’aurait pu être la fin de l’histoire, mais des études comparatives de crânes de pumas, de guépards et de jaguarondis menées une dizaine d'années plus tard révélèrent que le troisième différait beaucoup des deux premiers sur le plan anatomique. Cette révélation fut portée à la connaissance de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN), qui décida finalement en 2017 de remettre le mystérieux félin dans le genre Herpailurus. Depuis lors, son nom scientifique est (de nouveau) Herpailurus yaguarondi, et il est aujourd'hui encore le seul représentant de ce groupe.
Pour autant, la question n'est pas définitivement tranchée, et il n'est pas impossible que dans les années à venir de nouvelles découvertes remettent en cause cette classification pour en proposer une autre. Parmi les mystères qu'il reste à éclaircir, il y a par exemple le fait que le jaguarondi possède 38 chromosomes, ce qui le rend plus proche des félins de l'Ancien Monde que de ceux du continent américain, qui n'en possèdent que 36.
Si le mot "jaguarondi" fait inévitablement penser au mot "jaguar", les deux prédateurs sont en réalité assez éloignés sur le plan taxonomique. En effet, le jaguarondi est un féliné, alors que le jaguar appartient lui à une sous-famille différente, que l'on appelle un peu abusivement les grands félins et dans laquelle on trouve notamment le lion, le léopard ou la panthère des neiges.
Les sonorités similaires découleraient du fait que les Indiens du Brésil désignaient la plupart des félins par des mots composés du préfixe "ya" signifiant « écraser avec les pieds sur-le-champ », auquel était accolé un suffixe précisant une qualité / habileté / habitude propre à chaque espèce. Ainsi, dans la langue tupi des Indiens du Brésil, "jaguar" signifiait « carnassier qui écrase sa proie d’un seul bond », tandis que "jaguarondi" signifiait le « yaua qui louche », en référence au fait qu'il possède des yeux rapprochés et des pupilles rondes et rétractiles. Cette explication a été suggérée par le scientifique Emmanuel Liais dans son ouvrage Climats, géologie, faune et géographie du Brésil, publié en 1827.
Si les débats continuent de faire rage concernant la taxonomie du jaguarondi, il en va de même pour ses sous-espèces.
Au cours des 19ème et 20ème siècles, 8 sous-espèces étaient reconnues par les scientifiques :
Toutefois, à ce jour, l'UICN ne reconnaît plus que 4 sous-espèces de jaguarondi : Cacomitli, Fossata, Panamensis et Tolteca.
Nombreux sont les auteurs qui reprochèrent au jaguarondi de ne pas ressembler tout à fait à un félin.
Il faut dire qu'avec son corps allongé, ses formes grêles, ses pattes relativement courtes, sa tête menue, sa face plate, son pelage atypique et ses petites oreilles arrondies et écartées sur le sommet de son crâne étroit et convexe, il a effectivement davantage l'allure d'un mustélidé que d'un félin. Il a d'ailleurs été souvent comparé à la martre, la belette ou le tayra, et a même été affublé du surnom un peu grotesque de chat-loutre. En ce sens, il se rapproche un peu du Chat à Tête Plate, qui possède lui aussi un physique assez surprenant. Ses yeux vont du bleu à l’ambre foncé et sont cerclés de poils clairs.
En dépit de ces particularités, le jaguarondi n'est pas si différent du chat domestique. Un peu plus grand que lui, il mesure à l'âge adulte environ 35 cm au garrot pour 53 à 76 cm de longueur - sans compter la queue, qui atteint généralement 31 à 52 cm de longueur. Quant à son poids, il se situe globalement entre 3 et 7 kg. Le dimorphisme sexuel est peu marqué, les mâles étant à peine plus lourds que les femelles.
Enfin, les poils corporels sont ras sur l'ensemble du corps, sauf sous la queue où ils sont plus longs.
Le jaguarondi se distingue des autres petits félins d'Amérique du Sud par le fait qu'il arbore un pelage uni - en tout cas à l'âge adulte, car les petits naissent tachetés et perdent leurs taches au fur et à mesure de leur croissance. Les marques derrière les oreilles, communes à de nombreux félins, sont chez lui soit mal définies, soit carrément absentes.
Sa couleur de robe peut être gris-brun, rougeâtre, ou complètement noire dans le cas où l'individu est atteint de mélanisme. Longtemps, scientifiques et naturalistes ont pensé que ces différentes colorations correspondaient à des espèces distinctes, jusqu’à ce qu’ils découvrent des chatons ayant des pelages dissemblables au sein d'une même portée. Comme souvent, les couleurs grises et noires sont plus fréquentes dans les forêts denses et humides, tandis que la forme rousse est surtout présente dans les milieux arides. D'après les dernières études génétiques réalisées, c'est cette dernière qui serait la couleur originelle du jaguarondi, les autres étant le fruit d'une évolution adaptative pour lui permettre de mieux se dissimuler dans la pénombre des forêts.
Si la coloration est globalement unie sur l'ensemble du corps, certains spécimens possèdent une fourrure légèrement plus foncée au niveau de la section dorsale et plus claire au niveau du ventre, de la gorge et de la tête. Par ailleurs, les poils n'ont pas la même teinte sur l'ensemble de leur longueur : à la loupe, on peut distinguer des alternances de bandes foncées et claires, ce qui donne l'impression d'un changement de couleur lorsqu'il se hérisse. Il s'agit d'une particularité appelée "ticking" que l'on retrouve aussi chez quelques races de chats, l'exemple le plus connu étant l'Abyssin.
Originellement, le jaguarondi se trouvait du sud du Texas jusqu’aux basses terres côtières du Mexique (c'est-à-dire dans toute l’Amérique centrale), ainsi que dans la majeure partie de l’Amérique du Sud, depuis l’est des Andes jusqu’au nord de l’Argentine. En Amérique du Nord, son aire de répartition semble naturellement restreinte par la présence du lynx roux, un prédateur concurrent plus volumineux et avec lequel il ne saurait rivaliser.
Aujourd'hui, sa présence est incertaine non seulement en Uruguay, mais aussi au Texas, où aucun spécimen mort ou vivant n'a plus été aperçu depuis 1986. En dépit de cela, son aire de répartition reste assez large, puisqu'on le trouve en Amazonie, dans les forêts du Mexique et du Costa Rica, dans les Andes argentines, au Paraguay, au Bélize et dans plusieurs autres pays. Elle recouvre ainsi pas moins de cinq parallèles géographiques, soit des millions de kilomètres carrés et des milieux très variés tant en termes d'altitudes que de climats.
L'habitat de prédilection du jaguarondi est constitué de forêts tropicales et de sous-bois inextricables à proximité des ruisseaux et des cours d'eau. Mais sa remarquable capacité d'adaptation lui permet de s'épanouir confortablement dans différents types de milieux, depuis le niveau de la mer jusqu’à 2000 mètres d’altitude. Lorsqu'il est privé de ses écotopes favoris, il s’accommode d’espaces forestiers réduits, de zones plus ouvertes ou broussailleuses, voire d’habitats dénaturés (plantations, champs abandonnés...) qui ne conviendraient guère à d’autres félins plus arboricoles. De très rares observations colombiennes confirment même sa présence jusqu'à 3200 mètres d’altitude, un maximum pour l’espèce.
Les principales études scientifiques au sujet des habitudes territoriales du jaguarondi ont été réalisées au Bélize, au Mexique et au Vénézuela. Il en ressort que son territoire peut prendre des proportions très variables selon les pays.
Au Bélize, par exemple, le territoire d’un jaguarondi est très étendu, puisqu'il peut couvrir jusqu’à 100 km² pour un mâle, soit plusieurs fois celui d’un jaguar adulte, qui est pourtant bien plus imposant que lui. Il n'en va toutefois pas de même dans les autres pays, puisque l’aire vitale moyenne du jaguarondi est respectivement de 7 km² au Brésil et de 9 km² au Mexique.
Farouche, le mâle adulte défend son territoire contre ses rivaux, mais il tolère la présence d'une à deux femelles, dont le domaine vital est plus petit. Très actif, il parcourt en moyenne 6,6 km par jour, et ce toujours dans le même sens, avec très peu de demi-tours ou d’ondulations sur son itinéraire.
Pendant longtemps, les spécialistes ont pensé que le jaguarondi était un grand solitaire, à l'image de la quasi-totalité des autres félins, et qu'il ne dérogeait à cette règle que lors de la courte saison des amours. De fait, lorsqu'elles surviennent, les interactions entre individus de même sexe sont brèves, intimidantes, hérissées de tumulte et de fureur, parfois tâchées de sang - particulièrement lorsqu'il s'agit de mâles. Le danger de ces confrontations est tel qu'ils préfèrent les éviter autant que possible.
Pourtant, plusieurs observations ont fait état de spécimens vivant et chassant par paire dans certains territoires bien définis du Paraguay et du Bélize, suggérant que le jaguarondi serait plus sociable qu'envisagé originellement. Mais les informations manquent encore à ce jour pour déterminer la nature de ces dyades : peut-être ne s'agissait-il que de couples pendant la saison des amours, ou de mères accompagnées de leur petit. En captivité en revanche, le jaguarondi se montre grégaire, du moins entre membres d'une même famille.
Le jaguarondi possède un répertoire vocal riche et inhabituel qui recouvrent au minimum 13 cris. Parmi eux, l’appel « wah wah » est utilisé lorsque deux individus s'approchent de très près : il consiste en de courtes vocalisations atonales étouffées se suivant à intervalles réguliers.
Il est aussi capable de ronronner (comme les autres félinés, et contrairement aux grands félins, qui eux rugissent), mais aussi de siffler, jacasser, japper à la manière d'un chien, et même pépier, produisant à s’y méprendre des sons proches des chants d’oiseaux.
Cet arsenal de sons rythmiques souvent produits par la gorge est utilisé entre congénères lors de situations amicales, de séduction ou de soutien.
Bien qu'il soit un habile grimpeur et qu'il puisse chasser pendant la nuit, le jaguarondi est un animal plutôt terrestre et diurne. C'est sans doute la raison pour laquelle son pelage n'est pas tacheté ou rayé, contrairement à celui de la plupart des félins. Ce mode de vie lui permet de ne pas être en concurrence directe avec l'ocelot ou le margay, deux autres chats d'Amérique latine qui passent beaucoup de temps dans les arbres et sont surtout actifs à la nuit tombée.
D’après une étude de radiopistage réalisée au Bélize par Michael John Konecny en 1990, le jaguarondi commence à se montrer avant l’aube, aux alentours de quatre heures du matin, puis reste actif tout le jour jusqu’au coucher du soleil, vers dix-huit heures. C’est en fin de matinée que sa période de chasse atteint son apogée.
Le jaguarondi est un mésocarnivore muni de 30 dents. Comme la quasi totalité des félins, il n'a pas de régime très précis : c’est un chasseur opportuniste qui se repaît de la proie la plus abondante et la plus facile à tuer dans sa zone géographique. C'est en tout cas l'hypothèse la plus communément admise à ce jour par les spécialistes, sur la base des études menées au Bélize, au Brésil, au Vénézuela, en Colombie et au Paraguay.
Bien qu'il sache très bien grimper aux arbres et qu'il soit capable de faire un bond avoisinant les deux mètres pour surprendre une proie sur une branche, le jaguarondi est avant tout un prédateur terrestre. Il ne se réfugie dans les hauteurs qu'occasionnellement, par exemple pour échapper à un prédateur ou pour faire une sieste à l'abri des dangers.
Il se nourrit surtout de petits animaux dont le poids est inférieur à un kilo : des rongeurs en quantité, accompagnés d'une moindre proportion d’oiseaux marcheurs et de reptiles. Des relevés ont montré qu'il tue parfois aussi des animaux plus gros comme des lapins, des agoutis, des opossums, des tatous, des paresseux, des iguanes adultes et éventuellement des petits singes tel le titi au Brésil. Il est également connu pour s'en prendre à la volaille domestique.
Lorsque l’occasion se présente, il s’alimente aussi de poissons piégés dans des mares temporaires, en grande partie des characidés, qui constituent une famille de poissons d'eau douce très appréciés des aquariophiles - et visiblement pas que d'eux…
Il complète son régime avec des fruits, des feuilles et des herbes, comme le chat domestique, ainsi que des arthropodes, des insectes et d'autres invertébrés divers (araignées, scolopendres et consorts). Ces derniers ne constituent pas à eux seuls un apport énergétique suffisant, mais ils lui permettent de se sustenter dans l’attente de proies plus généreuses. Après tout, comme le dit le proverbe : « faute de grives, on mange des merles ».
Malgré la relative abondance de l’espèce, la science connaît peu de choses sur la reproduction du jaguarondi en milieu naturel. Certains spécialistes ont émis l’hypothèse qu'il n’a pas de saison des amours dans les tropiques, au Mexique et au Texas. D’autres suggérèrent qu’il en aurait deux annuelles, ou une seule en automne.
En captivité en revanche, les données sont plus nombreuses, même si elles ne sont probablement pas toutes extrapolables à la vie sauvage. Les naissances de chatons jaguarondis y ont lieu en janvier, juin, août et jusqu'en octobre. D’après l'ouvrage intitulé A Field Guide to the Carnivores of the World élaboré par Luke Hunter et Priscilla Barrett en 2011, ce félin serait donc capable de se reproduire à n’importe quel moment de l’année. Ceci serait rendu possible par le fait que les femelles auraient des cycles de chaleur tous les 54 jours environ.
Les observations sur des animaux captifs indiquent que les chaleurs ne durent que 3 à 5 jours, ce qui est assez peu. Durant ces périodes, le comportement de la femelle jaguarondi se modifie : elle se roule davantage sur le dos et émet de faibles vocalisations durant les marquages olfactifs de son territoire. Dans ces circonstances, un mâle expérimenté fait montre d’attention, poursuivant la belle, tolérant un nombre important d’agressions de sa part et ripostant très peu. L’accouplement s’accompagne d’un cri bruyant au moment de la pénétration, puis se termine avec la morsure typique des félins, lors de laquelle le mâle saisit dans ses crocs le cou de la femelle.
Après une gestation de 70 à 75 jours, c'est-à-dire globalement autant que la gestation d'une chatte domestique, la femelle jaguarondi met au monde une portée de 1 à 4 petits (la moyenne est de 2), qu'elle camoufle dans des tanières situées dans des fourrés épais, des arbres creux, sous des arbres tombés, des fossés envahis de végétation voire des touffes d’herbe épaisses. Les petits naissent sourds et aveugles, mais dotés d'une belle fourrure avec des taches sur le ventre.
Pendant les premiers temps, la mère veille au grain et ne les laisse jamais seuls, sauf pour chasser et se nourrir. Lorsqu'ils atteignent trois semaines, elle commence à leur apporter de la nourriture afin qu’ils puissent jouer avec et la mâchouiller. Après 6 semaines, ils sont capables d’ingérer de la viande. Tout au long de cette période, les mâles joueraient un rôle protecteur vis-à-vis des petits en éloignant les prédateurs des tanières.
Après la période d’initiation à la chasse, vient inéluctablement celle de la séparation : quand ils atteignent environ 2 ans, la mère dépose ses petits hors de son domaine, signe qu'ils doivent partir à la recherche de leur propre territoire. C’est le moment la plus périlleux dans la vie d'un jeune jaguarondi, car pour y parvenir, il doit traverser le domaine de congénères adultes, ainsi que celui d’autres espèces comme les ocelots, les pumas et les jaguars, qui pourraient bien le punir de mort pour cet outrage.
En captivité, le jaguarondi atteint la maturité sexuelle à partir de 16 mois, au plus tard à 2-3 ans, et vit entre 10 et 15 ans. Son espérance de vie à l'état sauvage est inconnue, mais elle est probablement plus faible, peut-être d'une petite dizaine d'années.
Malgré sa taille réduite, le jaguarondi n'a pas beaucoup d'ennemis naturels. À l'occasion, il peut être attaqué par un jaguar ou un puma, qui compte tenu de son gabarit ne fait qu'une bouchée de lui. Mais ces deux prédateurs étant plutôt nocturnes, il ne les rencontre au final que rarement, même s'ils partagent les mêmes territoires.
Son principal rival serait plutôt l'ocelot. Il est vrai que sa présence influence négativement les populations de jaguarondis, puisque tous deux sont en concurrence pour le même genre de nourriture. Mais là encore, les différences de mode de vie sont telles que la cohabitation n'est peut-être pas si problématique que cela.
Le plus gros danger pour le jaguarondi est en fait l'Homme, du fait de la destruction de son habitat naturel par les activités humaines. Plus particulièrement, l'expansion agricole et l'élevage intensif entraînent un grignotage continu de son habitat de prédilection pour le remplacer par des cultures de palmiers oléagineux ou de pâturages destinés au bétail, qui sont des lieux de vie moins favorables pour lui. À ces détériorations considérables s’ajoute, dans une moindre mesure, la construction de voies de communication asphaltées et de chemins de fer, qui aggrave la fragmentation de son habitat et fait qu'un certain nombre de représentants de l'espèce sont victimes d'accidents de la route.
Dans un autre registre, le jaguarondi est la cible des éleveurs en raison de sa propension à s'en prendre à la volaille. Les représailles (qui prennent souvent la forme de tirs au fusil) sont monnaie courante au Mexique et au Brésil. En dehors de ce cas précis, il n'est pas chassé par les humains, que ce soit pour des raisons rituelles, thérapeutiques ou ornementales - seules certaines communautés marginales du Mexique semblent s'y intéresser pour ces raisons. Mais il lui arrive tout de même de tomber dans des pièges destinés à des animaux ayant une valeur commerciale, comme l'ocelot ou le margay.
Pour toutes ces raisons, l'UICN estime que ses populations sont déclinantes en Amérique du Nord et en Amérique centrale, où il serait d'ailleurs en voie d'extinction. Mais dans la mesure où il n'est pas particulièrement menacé en Amérique latine à l'heure actuelle, il fait toujours partie des espèces dont la priorité de préservation est la plus basse, et reste donc un des très rares félins à ne pas figurer sur la liste rouge de l'organisation.