Suisse - Les mystères du chat sauvage du Jura

28/01/2010

Le félin relâché mardi en forêt, après un séjour au Zoo La Garenne, a réveillé l’intérêt du public pour cet animal mythique. Discret, farouche, il est très difficile à recenser.


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Les mystères du chat sauvage du Jura
FAUNE | Le félin relâché mardi en forêt, après un séjour au Zoo La Garenne, a réveillé l’intérêt du public pour cet animal mythique. Discret, farouche, il est très difficile à recenser.
Yves Merz


Photo
© CHRIS BLASER |

«Pour moi, avoir pris soin de ce chat sauvage a quelque chose d’un peu mythique», a confié, ému, le directeur du Zoo La Garenne, Pierre Ecoffey, peu avant de lui rendre sa liberté (24 heures d’hier). Mythique, le chat domestique ne l’est pas moins, lui qui était déjà vénéré par les Egyptiens il y a plus de 5000 ans. Mais son cousin des forêts reste une énigme, tant il est difficile de l’apercevoir. Et, surtout, ce qui est rarissime, c’est de pouvoir en observer un vivant.

Retrouvé groggy sur l’autoroute Orbe-Vallorbe le 6 janvier, ce chat sauvage était choqué mais pas blessé. Après vingt jours de convalescence au zoo de Le Vaud, il a été relâché sur son territoire vers Les Clées. Ce mâle adulte n’a pas fait avancer le peu de connaissances que l’on a de cette espèce. Pour cela, il faudrait le voir évoluer dans son milieu. «Mais il était intéressant de constater qu’il cumulait toutes les caractéristiques qu’on lui attribue», précise Pierre Ecoffey.

Ni gros ni féroce
Les amateurs de contes fantastiques, qui ont à l’esprit l’image d’un grand chat féroce avec de longues canines et une longue queue, seront peut-être déçus. Notre spécimen du Jura ressemble comme deux gouttes d’eau au chat de ferme. Il n’est pas plus gros. Le mâle pèse entre 4 et 5 kg, alors qu’un matou castré bien nourri peut atteindre 7 kg.

Son pelage, généralement tigré, brun gris, avec des rayures noires, lui permet de se confondre dans la nature. «Ce qui le caractérise, c’est sa ligne dorsale noire et continue, note le surveillant de la faune Alain Seletto. Il a souvent une tache blanche sous le cou. Sa queue est très touffue, annelée, et ne finit pas en pointe. En fait, ce n’est que lorsqu’on en croise un très loin des habitations que l’on peut affirmer qu’il s’agit d’un chat sauvage.»

Très loin des habitations, en effet, car le chat domestique n’hésite pas à se rendre aussi en forêt. Sans parler de ceux qui, las des caresses, sont retournés vivre dans la nature. On les appelle les chats harets. Les hybridations ne sont pas non plus exclues. Notamment quand les mâles solitaires se rapprochent des villages par grand froid.

«D’où la grande difficulté de reconnaître un chat sauvage authentique», insiste le surveillant de la faune. Du moins vivant. Car les scientifiques savent que son cerveau est plus gros, et que son intestin est plus long. Mais seul un félin mort fournira de telles informations.

Les cousins sont physiquement très proches. Toutefois, le chat sauvage ne serait pas la souche du chat domestique qui, lui, descend du chat ganté d’Afrique, introduit d’Egypte par les Romains, mais encore fort rare au Moyen Age. Craint et pourchassé jusqu’à ce que l’homme comprenne qu’il ne s’en prenait qu’aux petits rongeurs, le Felis silvestris, seul félin sauvage, avec le lynx, à vivre dans nos régions, est désormais protégé dans toute l’Europe.

Une méthode au poil pour compter les chats

L’Office fédéral de l’environnement vient de lancer un programme pour évaluer l’évolution des effectifs de chats sauvages au niveau national. L’étude est en cours dans le Jura, la seule région de Suisse où il semble vivre.

Du vivant de l’animal, l’unique manière de s’assurer qu’il s’agit d’un authentique chat sauvage est de recourir aux méthodes de génétique moléculaire.

Un seul poil suffit pour procéder à l’analyse génétique. Mais comment s’en procurer au fin fond des forêts du Jura? Des chercheurs ont observé que, en période de rut, mâles et femelles aiment se frotter à la valériane, une plante odorante. D’où l’idée de vaporiser de la teinture de valériane des poteaux de bois non rabotés, puis de les planter en forêt.

Les chercheurs n’ont plus qu’à récupérer les poils laissés sur ces poteaux. Ils livreront leur information génétique.

De savants calculs statistiques permettront ensuite de faire des estimations assez précises des populations.